Gabon : « Jean Ping vient probablement de rater sa dernière occasion de devenir président »

Jean Ping tente encore de donner le change sur les réseaux sociaux, mais ses lieutenants confient que le moral n'y est plus © JP – Facebook

C’est ce qu’a confié l’un des principaux lieutenants de l’opposant dont le moral est, semble-t-il, atteint. Ali Bongo arrivé à Rabat et sorti d’affaire sur le plan médical, Jean Ping peine à mobiliser les Gabonais. Les marches de protestation promises par ses proches dans tous le pays ont été un échec cuisant. 

Au QG de Jean Ping, dans le quartier des Charbonnages situé dans le premier arrondissement de Libreville, l’espoir suscité par l’hospitalisation d’Ali Bongo le 24 octobre dernier a désormais fait place à la déception.

« On y croyait pourtant, confie Franck, un militant fervent. Mais là, il faut le reconnaître, les nouvelles ne sont pas bonnes pour nous », ajoute-t-il, dans un souffle de dépit.

Les mauvaises nouvelles auxquelles Franck fait référence, ce sont celles du transfert d’Ali Bongo hier matin de Riyad où il était hospitalisé depuis plus d’un mois vers Rabat au Maroc où le président doit achever sa convalescence. Un transfert rendu possible en raison « de l’amélioration significative de l’état de santé » du président, a indiqué la première dame, Sylvia Bongo, mardi dernier sur Facebook. « Le chef de l’Etat gabonais a recouvré tous ses automatismes », a insisté le gouvernement dans la foulée.

Chez les principaux lieutenants, de Jean Ping, l’humeur n’est plus au beau fixe. « Nous savions que nous avions une fenêtre de tir limitée. Mais nous ne sommes pas parvenus, il faut bien l’admettre, à rassembler la population. Du coup, nous n’avons pas pu faire pression sur les institutions comme nous l’espérions », concède l’un d’entre eux.

Le leader de la Coalition pour la Nouvelle République (CNR) a en effet tout tenté pour pousser le gouvernement a demandé à la Cour constitutionnelle de déclarer la vacance. En vain. Il faut dire que, dès le départ, l’affaire était mal emmanchée. Lors de sa déclaration au peuple gabonais, le 3 novembre dernier, aucun des grands leaders de l’opposition n’était présent et aucun d’entre eux n’a répondu positivement à son appel à l’union nationale.

Ce que rappelle d’ailleurs l’AFP dans une dépêche diffusée hier. Cet « appel au rassemblement de tous les Gabonais lancé par Jean Ping, rival malheureux d’Ali Bongo à la présidentielle de 2016 qui se proclame toujours ‘président élu’, est resté sans suite à ce jour » (lire à ce sujet notre précédent article).

De fait, l’opposition, tiraillée par de profondes divisions, est apparue incapable de tirer partie politiquement de l’absence du président Ali Bongo. « Ses appels à manifester contre le ‘coup d’Etat constitutionnel’ [suite à la décision de la Cour constitutionnelle du 14 novembre dernier] lors de rassemblements à Libreville ont échoué, seules quelques dizaines de personnes y ayant répondu », relate l’AFP dans la même dépêche (lire également à ce sujet notre précédent article).

« Jean [Ping] vient probablement de rater sa dernière occasion de devenir président », nous confiait hier, le regard triste, l’un de ses alliés les plus fidèles, avant de lâcher dans un élan de lucidité : « Jean [Ping] essaie encore de donner le change sur les réseaux sociaux, mais l’enthousiasme des premiers jours n’y est plus ».

Lors de la prochaine élection présidentielle prévue en 2023, l’opposant, ex-pilier du régime d’Omar Bongo dont il a épousé la fille, Pascaline, aura en effet 81 ans.