Gabon : le Rassemblement Héritage et Modernité se déchire sur la question de la participation aux élections législatives

Alexandre Barro Chambrier, le leader du Rassemblement Héritage et Modernité, est déjà en campagne pour les élections législatives de 2018. Ici à Mékambo, chef-lieu du département de Zadié dans la province de l'Ogooué-Ivindo. Source : compte Twitter @pahedipoula

Au Gabon, les élections législatives – prévues le 28 avril prochain mais qui seront, selon toute vraisemblance, reportées pour la troisième fois – n’en finissent plus de fracturer l’opposition.

Le Rassemblement Héritage et Modernité (RHM), le parti d’Alexandre Barro Chambrier, l’une des principales figures de l’opposition gabonaise et pilier de la Coalition pour la nouvelle République dirigée par Jean Ping, vient de perdre trois de ses responsables d’arrondissement à Port-Gentil, la « capitale » de l’Ogooué-Maritime. Stéphane Mounguengui, Gildas Mboumba Boussoungou et Jean Sissou, ont en effet démissionné de cette formation d’opposition lundi 16 avril.

Ces défections interviennent moins d’une semaine après l’annonce de la participation du Rassemblement Héritage et Modernité – faite le 10 avril dernier par son leader, Alexandre Barro Chambrier – aux prochaines élections législatives. Une stratégie « en totale contradiction avec la majorité des partis de la Coalition autour de Jean Ping », estiment les trois démissionnaires dans leur courrier adressé au responsable provincial du parti, Yves Bouangas Issani.

Cet épisode est symptomatique des divisions qui fracturent aujourd’hui l’opposition gabonaise. De fait, le front uni qu’elle était parvenue à constituer lors du scrutin présidentiel d’août 2016 s’est depuis disloqué.

En cause, des divergences tactiques entre les partisans de la participation et ceux du boycott au prochain scrutin législatif. Dans le camp des premiers, on trouve des poids lourds de l’opposition, à l’instar de Zacharie Myboto (Union nationale) ou Guy Nzouba-Ndama (Les Démocrates). Dans le camp des seconds, figurent plutôt des poids moyens ou légers, tels que Jean Eyeghe Ndong, Fabien Mere ou encore les membres du CNR issus de la diaspora. Or, si le torchon brûle sur ce sujet au sein de l’opposition gabonaise, c’est aussi parce que la participation aux législatives ôte à l’aile la plus contestataire son principal argument : l’illégitimité des institutions et, partant, des élections organisées dans la foulée du scrutin présidentiel contesté d’août 2016.

Autre point de friction entre les opposants, désormais répartis entre radicaux et modérés, même si cette frontière est en partie artificielle : la participation à certaines commissions du Centre gabonais des élections (CGE), ainsi que l’élection de son président. Le CGE, créé en 2017 suite au dialogue politique d’Angondjé, doit en effet être composé de cinq représentants du pouvoir et de cinq de l’opposition. Les places sont donc chères.

A ces divergences tactiques s’ajoutent des querelles de leadership. Plusieurs responsables de l’opposition estime que « Jean Ping a eu sa chance en 2016 » et qu’il devrait désormais, à son âge (76 ans en novembre prochain), passer la main à une nouvelle génération.

Des querelles d’hommes exacerbées par des tensions financières. Au sein de l’opposition, plusieurs responsables se plaignent de difficultés de plus en plus grandes à financer leur mouvement, reprochant à Jean Ping « de ne pas avoir tenu ses promesses à ce sujet », pour reprendre les propos de l’un d’entre eux.