SEEG / Gabon : dépité, le groupe Veolia se tourne vers la justice

Pierre Gattaz, le président du Medef, le syndicat patronal français, a adressé un courrier "truffé de fautes d'orthographe", aux autorités gabonaises au sujet de l'affaire SEEG / Veolia.

Veolia aura tout fait pour tenter de conserver « sa » concession, essayant de remuer ciel et terre. Mais le Gabon, lui, a tenu bon. Faute d’avoir réussi à mettre la pression aux autorités gabonaises par un lobbying intense, l’entreprise française Veolia, qui s’est vue retirer en février la concession de distribution d’eau et d’énergie au Gabon, s’est finalement résignée à saisir la justice. Pour attaquer le Gabon en justice, le groupe Veolia a fait appel au cabinet d’avocats américain Mayer Brown, croit savoir la Lettre du Continent dans sa dernière édition.

La procédure toutefois sera longue et aléatoire, juge un avocat d’affaires spécialistes des dossiers africains. Les autorités gabonaises affichent d’ailleurs leur sérénité. Elles affirment en effet que les aspects juridiques ont été dument étudiés et sécurisés via des cabinets internationaux. En cas de procès, « le Gabon a de bons arguments », a déclaré il y a quelques jours le porte-parole du gouvernement, Alain Claude Bilie-By-Nze.

D’emblée, les dirigeants de l’entreprise française avaient indiqué vouloir porter l’affaire devant les tribunaux, notamment devant le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements basé en France (CIRDI). « Mais à l’époque, il s’agissait davantage d’une tactique d’intimidation », prévient une source proche du dossier à Paris. « Mais le Gabon n’a pas cédé. Le groupe Veolia, qui pensait pouvoir faire plier les autorités gabonaises dans un premier temps, s’est donc résolu à saisir la justice. Les dirigeants de l’entreprise tentent de faire bonne figure, mais ils sont en réalité assez dépités », précise-t-elle.

Veolia peu soutenu, y compris à Paris

A Paris, la plupart des connaisseurs de la relation entre l’Afrique et la France partagent la même analyse. « Le Groupe Veolia s’est rapidement rendu compte qu’il ne pourrait pas compter sur le soutien tant des pouvoirs publics français que du secteur privé hexagonale, contrairement à ce qu’il a tenté de laisser penser à travers sa communication. En réalité, chaque entreprise a ses propres intérêts et celles-ci n’aiment pas être assimilées à ce genre de dossier. Chacun ses problèmes en somme. Même Pierre Gattaz [le patron du Medef qui a adressé un courrier aux autorités gabonaises le 26 février dernier] s’est manifestement fait forcer la main », nous confie-t-on. Signe de la légèreté avec lequel ce dossier aurait été traité par M. Gattaz : le courrier qu’il a officiellement adressé à la partie gabonaise est truffé de fautes d’orthographe. « Il n’a sans doute pas été lu par l’intéressé », s’amuse un chef d’entreprise français, dont le groupe est très investi sur le continent africain.

Veolia a, semble-t-il, été surpris par la réaction du gouvernement gabonais. D’une part celui-ci n’a pas plié, mais qui plus est, il s’est défendu bec et ongle dans les médias. « En Afrique, beaucoup ont été admiratifs de la résistance opposée par ce pays d’Afrique Centrale à la multinationale occidentale », nous glisse un journaliste spécialisé dans les questions économiques. Une source à Libreville nous assure que les autorités gabonaises auraient, à cette occasion, reçu de nombreux témoignages de soutien en provenance des quatre coins du continent.