Ike Ngouoni : « où est allé tout cet argent si ce n’est dans la poche des actionnaires de Veolia ? »

Ike Ngouoni, le porte-parole de la présidence du Gabon, invité du JT Afrique de TV5 Monde jeudi 22 février 2018.

Invité du Journal Afrique sur TV5 jeudi 22 février, le porte-parole de la présidence est revenu sur le différend opposant le Gabon à Veolia sur la Société d’eau et d’énergie du Gabon (SEEG).

Il y a une semaine, presque jour pour jour, vendredi 16 février, le gouvernement gabonais mettait un terme à la convention de concession le liant à Veolia, actionnaire majoritaire de la SEEG, société de distribution d’eau et d’énergie. Depuis, les deux parties se livrent une intense bataille de communication. Jeudi 22 février, le porte-parole de la présidence gabonaise, invité du JT Afrique de TV5 a balayé certains des arguments « mensongers » utilisés par le groupe français Veolia dans sa communication. En voici un résumé (deuxième partie).

L’Etat gabonais n’a-t-il pas suffisamment investi dans les infrastructures de distribution d’eau et d’électricité, comme le soutient Veolia ?

Le porte-parole de la présidence gabonaise rejette en bloc cette accusation. « C’est faux à nouveau », dit-il, avant de poursuivre : « ce que nous reconnaissons, c’est que Veolia n’a pas été en capacité de délivrer le service que les Gabonais étaient en droit d’attendre. Dans les quartiers à Libreville ou dans les villes à l’intérieur du pays, des gens sont obligés de se lever à 4h du matin pour aller chercher de l’eau. Ce que nous reconnaissons également, c’est le fait que le 31 décembre 2017, jour de la Saint-Sylvestre, les Gabonais l’ont passé dans le noir. Soyons sérieux, l’Etat gabonais a fait tous les efforts qu’il fallait pour soutenir la SEEG / Veolia afin qu’elle puisse rendre les services attendus. »

Veolia dit ne pas avoir eu les moyens d’investir dans les infrastructures… ?

Ici, aussi, Ike Ngouoni rejette catégoriquement cette allégation. « L’Etat a consenti à une hausse des tarifs pour permettre à l’opérateur de financer ses investissements », rappelle-t-il avant de préciser. « D’ailleurs, entre 2009 et 2014, les tarifs de l’électricité ont augmenté de 75 % ; le prix de l’eau de 48,5 %. Où est allé tout cet argent si ce n’est dans la poche des actionnaires de Veolia ? Pourquoi Veolia n’a-t-elle pas assumée ses obligations d’investissement, inscrites noir sur blanc dans la convention de concession ? »

Que répondez-vous face à Veolia qui menace de recourir à la voie judiciaire (en l’occurrence, à une procédure d’arbitrage international devant le CIRDI) ?

« L’Etat gabonais est parfaitement serein », répond sans ambages Ike Ngouoni, « car il a observé strictement le droit », précise-t-il avant de poursuivre : « deux lois en particulier font référence en la matière : d’une part, l’ordonnance numéro 09/PR/2016 qui réglemente les partenariats publics et privés en République gabonaise et qui offre la possibilité d’une résiliation des conventions de concession dans le cadre de la préservation de l’intérêt général ; d’autre part, une loi de 1985 qui spécifie l’ensemble des modalités dans le cadre d’une réquisition d’usage. Ces textes de loi ont été strictement respectés. Il ne s’agit donc nullement d’une expropriation, comme le prétend Veolia. »

La fin de la concession est-elle réellement le fait du Gabon… ?

Les précisions d’Ike Ngouoni sont d’autant plus intéressantes qu’elles permettent de battre en brèche les élements de communication de Veolia : « l’Etat du Gabon, début 2017, a prévenu Veolia qu’il fallait qu’elle améliore très sensiblement son offre de service, nettement insatisfaisante. Durant la période transitoire d’avril à novembre 2017, nous avons tenté de négocier au mieux avec Veolia pour préserver les intérêts des Gabonais. Maintenant, c’est la SEEG / Veolia qui, en novembre dernier, a acté l’échec de ces négociations et non l’Etat du Gabon. Des documents officiels, rendus publics, le prouvent. »

Veolia soutient que l’Etat gabonais lui devrait 44 milliards de FCFA de dette. Comment compter vous rembourser cette dette ?

« Nous n’allons pas rembourser une dette qui n’existe pas », répond du tac au tac le porte-parole de la présidence du Gabon, arrachant au passage un sourire à la journaliste. « Ces montants sont totalement exorbitants, sans aucun rapport avec la réalité », explique-t-il. Et celui-ci de préciser : « la dette n’est pas du tout de ce niveau-là. Il faut que nos amis de Veolia apprennent aussi un petit peu à compter. La dette de l’Etat gabonais envers Veolia est d’un peu moins de 4 milliards de FCFA. C’est tout. »