Afrique centrale : Le Rwanda mise sur la transformation sur place des ressources minières pour développer son industrie et créer des emplois

Le président rwandais, Paul Kagame © DR

A l’instar du Gabon, le Rwanda a mis en place des réformes destinées à faire de l’industrialisation un vrai levier de développement de son secteur minier. Pour atteindre cet objectif, le pays dirigé par Paul Kagame a élaboré depuis 2017 la « Stratégie nationale de transformation » qui fixe des objectifs clairs à atteindre au plus tard en 2024.

Kigali donne la priorité aux investissements qui apportent de la valeur ajoutée aux produits miniers du pays, particulièrement les 3T : étain, tantale et tungstène. Dans cette optique, le pays mise sur la construction d’un grand nombre d’usines destinées à fondre la cassitérite en étain, à raffiner du wolframite pour obtenir du tungstène et à transformer la tantalite en tantale.

Remonter la chaîne de valeur

Le Rwanda dispose déjà d’une fonderie capable de raffiner de grandes quantités d’or. Le pays veut attirer toute la production d’or de la sous-région pour capter davantage de valeur ajoutée. Mieux, Kigali ambitionne de se lancer dans la taille et le polissage des pierres précieuses. Un secteur peu exploité par les pays africains, y compris la RDC pourtant très riche d’un point de vue géologique.

Le Rwanda a compris que la création d’une chaine de valeur efficace pour la transformation de produits miniers permettrait d’en faire une destination qui attirerait notamment les producteurs miniers africains dont les pays de la sous-région, et principalement la RDC.

Pour attirer les investisseurs, outre son nouveau code minier adopté en 2018, le pays de Paul Kagame a mis en place le Rwanda Mines, Petroleum And Gas Board (RMB). Cette institution est chargée de coordonner les actions du gouvernement dans le secteur des mines et des hydrocarbures et conseille l’Etat sur les moyens à mettre en œuvre pour les développer.

Dix ans plus tôt, dès 2008, le Rwanda Development Board (RDB), l’organisme chargé du soutien et de la promotion des investissements dans le pays, s’est chargé de la mise en place d’un cadre réglementaire incitatif pour le développement du secteur minier.

Incitations fiscales pour les investisseurs

Au Rwanda, les investisseurs bénéficient d’une exonération d’impôts sur les bénéfices des sociétés allant jusqu’à 7 ans pour un investissement minimal de 50 millions USD. Pour les sociétés qui travaillent sur des projets d’exportation de minerais transformés sur le sol rwandais, elles bénéficient d’un impôt préférentiel de 15 % sur les bénéfices dans une limite de 50% du chiffre d’affaires. Il en est de même des équipements miniers qui sont exemptés d’impôts et taxes.

C’est ainsi que le Rwanda entend devenir un hub de l’industrie minière tant dans la sous-région que sur le continent Africain. Le pays toutefois n’est pas à l’abri des polémiques. Selon divers rapports d’ONG, l’industrie minière récemment construite au Rwanda serait  alimentée en grande partie par les minerais de la contrebande en provenance de la RDC.

Qu’il s’agisse de l’or ou des terres rares, ces minerais traversent la frontière du Congo voisin pour se retrouver au Rwanda. Un exemple : la douane congolaise n’a enregistré qu’à peine 3 kg d’or à l’exportation durant tout le premier semestre 2020 dans la partie est de la RDC. Or, plusieurs enquêtes documentées estiment jusqu’à 15 tonnes l’or qui sort par la fraude du pays, principalement du côté est.

Au tour de la RDC de jouer

Mais pour certaines, plutôt que de blâmer le Rwanda, les autorités RD congolaises devraient s’emparer du sujet : mettre effectivement en œuvre toutes les réformes initiées dans le cadre de son nouveau Code minier adopté en mars 2018 mais aussi lutter efficacement contre l’exploitation illégale de ses minerais dont une bonne partie échoue au Rwanda. La loi minière RD congolaise interdit en effet l’exportation des produits miniers bruts et même concentrés non finis.

De ce point de vue, les choses commencent à bouger. En août denier, le ministre des Mines de la RDC a pris un moratoire sur la transformation de concentré du cobalt. Beaucoup aujourd’hui appellent à l’élargissement d’une telle mesure à tous les principaux minerais d’exportation de la RDC.

(Par Actualité.cd)