Pourquoi le Gabon porte plainte contre la Lettre du Continent

Le Gabon annonce qu'il va porter plainte contre La Lettre du Continent © DR

Dans un communiqué publié ce matin, la Présidence de la République a annoncé qu’elle porterait plainte contre ce bi-mensuel spécialisé sur l’actualité africaine. En cause, la publication dans sa dernière livraison du 25 novembre d’un article intitulé « Famille Bongo : un deuxième héritier entre à la présidence » qu’elle qualifie de « mensonger et diffamatoire ». Explications. 

C’est peut de dire que l’article a fait bondir au Gabon. En particulier au Palais du Bord de mer qui, au lendemain de sa publication, s’est fendu d’un communiqué.

« Dans son édition du 25 novembre 2020, La Lettre du Continent a cru bon d’écrire que ‘Bilal, troisième fils du président gabonais Ali Bongo a interrompu les études qu’il menait aux Etats-Unis pour intégrer la force chargée de la sécurité du Palais du Bord de mer et de tout le staff présidentiel’ », indique le communiqué présidentiel (lire notre article).

« Recoupements faits, l’article en question comporte des erreurs matérielles », reconnaît un journaliste du quotidien gabonais L’Union, réputé être un fin limier. Un exemple ? « Les auteurs de l’article, qui a depuis été modifié sur le site internet, ont confondu Bilal Bongo, le troisième fils du président gabonais, avec Jalil, son deuxième fils, sachant que l’ainé est Noureddin », pointe du doigt ce journaliste.

« Récit fantasmatique »

Surtout, c’est l’information principale, au cœur de l’article de La Lettre du continent, qui pose problème. « Bilal, n’a nullement interrompu ses études aux Etats-Unis pour intégrer la force chargée de la sécurité du Palais du Bord de mer. Il a simplement effectué ponctuellement un stage pour pouvoir, à terme, intégrer l’armée de réserve », précise ce journaliste, l’un des mieux renseignés du pays.

Une information confirmée par plusieurs sources au sein de la Présidence où les réactions sont nombreuses. « On s’en prend à un jeune de 19 ans qui n’a rien demandé et dont le seul tort est de vouloir servir son pays et non d’intégrer la sécurité présidentielle en vue de je-ne-sais-quel dessin caché », s’indigne l’une d’entre elles. « Comme trop souvent, la réalité est tordue dans le simple but de nourrir le récit fantasmatique d’une succession filiale annoncée. Cette thèse implicite apparaît d’ailleurs clairement dans le titre », renchérit une autre.

Dans son communiqué, la Présidence ne manque d’ailleurs pas de fustiger La Lettre du Continent qui, selon elle, « a de longue date fait du ‘Gabon bashing’ son fonds de commerce ». Non sans quelques raisons d’ailleurs, selon le journaliste de L’Union. « Il est vrai que cette publication est connue pour avoir une ligne éditoriale hostile aux dirigeants du pays. Et il est vrai aussi que ses articles sont parfois, d’aucuns disent fréquemment, émaillés, disons, d’approximations », indique-t-il (lire notre article)

Des plaintes désormais systématiquement déposées

Au-delà du seul cas de La Lettre du Continent, la Présidence annonce que des plaintes seront désormais systématiquement déposées contre les auteurs d’« informations à caractère mensonger et diffamatoire » aussi bien au Gabon qu’à l’étranger. Les médias comme les réseaux sociaux seraient concernés.

Sur sa page Facebook ce matin, le porte-parole du président Ali Bongo Ondimba, Jessye Ella Ekogha, fait observer que « le respect des Lois ne saurait être à géométrie variable », avant d’ajouter que « le temps de l’impunité est (désormais) révolu ». Quelques minutes plus tard, celui-ci est revenu à la charge sur son compte Twitter. « Les fake news sont un danger pour la vie démocratique et peuvent mener à des conséquences dramatiques. C’est pourquoi il faut lutter contre elles sans relâche », écrit-il.

Un message d’une grande clarté et d’une grande fermeté.