Gabon : Pour avoir diffusé « des informations inexactes avec une insinuation malveillante mettant en cause l’intégrité physique du président Ali Bongo », le correspondant de RFI se voit retirer son accréditation pour deux mois

Le correspondant de RFI au Gabon, Yves-Laurent Goma, est aussi le propriétaire du site d'information Gabonactu © DR

La Haute autorité de la Communication (HAC) l’a annoncé hier soir à la télévision.

Yves-Laurent Goma, le correspondant de RFI au Gabon, est interdit pour deux mois d’exercer son métier de journaliste à compter de ce jeudi.

En cause, un reportage jugé tendancieux diffusé le 17 août dernier à l’occasion de la fête nationale gabonaise. Le correspondant de RFI y avait notamment soutenu que « le président de la République ne s’était à aucun moment levé comme autrefois pour saluer les troupes de l’armée ».

Une affirmation erronée qui avait ému nombre de ministres et de personnes présentes à la tribune qui, toutes, ont constaté que le chef de l’Etat gabonais s’était à plusieurs reprises levé au cours du défilé. Ce qu’atteste d’ailleurs des images vidéos.

Pour plus de détail à ce sujet, lire notre article : Gabon : RFI accusée de fake news et de partialité dans sa couverture du défilé militaire du 17 août

Ce jeudi 22 août, la Haute autorité a dénoncé « des informations inexactes avec une insinuation malveillante mettant en cause l’intégrité physique du président de la République Ali Bongo ».

RFI, tout en déplorant cette décision, a indiqué souhaiter que « son correspondant retrouve au plus vite son autorisation de travail afin qu’il continue de couvrir l’actualité gabonaise, comme il le fait sans discontinuer depuis 17 ans. »

Traitement partial

Même si la HAC n’a pas retenu ce motif dans sa décision, le traitement par RFI des festivités du 17 août a été jugé partial, le journaliste s’évertuant manifestement à dépeindre un Ali Bongo affaibli, incapable de diriger le pays, quitte à prendre ses distances avec la réalité (d’où le qualificatif d’ « insinuation malveillante » employé par la HAC).

Pour cet ex-journaliste de RFI, cette péripétie est révélatrice d’un mal plus profond. « Les médias du service public français sont sujets à une dérive idéologique ces dernières années. Le pluralisme est de moins en moins évident lorsque vous prenez des chaines comme France Info ou France Inter. Il est d’ailleurs impossible d’y faire carrière si vous ne partagez pas la pensée dominante, je dirais même hégémonique », déplore-t-il, rappelant que « 97 % des journalistes avaient affirmé avoir voté pour le même candidat lors de la présidentielle de 2012 » (NDLR : François Hollande en l’occurrence).

« Au sein du service public français de l’audiovisuel, il y une confusion de plus en plus grande entre journalisme et militantisme. Les choix éditoriaux sont très orientés. Souvent, ce sont les mêmes sujets, marginaux, qui sont surreprésentés à l’antenne », relève cet ex-journaliste. « En outre, le commentaire des journalistes prend totalement le pas sur les faits, réduits à la portion congrue. C’est donc plus une opinion qui est donnée qu’une information. Le journaliste, en somme, nous dit quoi penser. Du coup, il n’est pas étonnant que la profession de journaliste soit la plus détestée en France, même devant celle de banquier », s’exclame-t-il.

« Sous couvert de neutralité, il y a une vraie partialité »

« Ces médias vivent dans une bulle. Ils ne sont plus considérés comme crédibles par l’écrasante majorité des Français qui ne se laissent pas manipuler par ce qu’ils considèrent être une vaste entreprise idéologique dont ils ne sont pas dupes », fait-il observer.

Pour cet ex-journaliste, les tares dont souffrent les médias publics français se reflètent dans leur couverture de l’actualité africaine. « Il est évident qu’il y a un parti pris pro-opposition. C’est le courant romantique ultra-majoritaire dans les rédactions où les journalistes ne sont pas là pour dire le vrai mais le beau, autrement dit, défendre de leur point de vue la veuve et l’orphelin », constate-t-il. « Sous couvert de neutralité, il y a en réalité une vraie partialité », ajoute-t-il.

« Et tout cela se fait avec l’argent des Français car ce sont leurs impôts qui financent ces médias. On serait tout de même en droit d’attendre autre chose de la part de média public », déplore-t-il en conclusion de notre entretien.