Gabon : RFI accusée de fake news et de partialité dans sa couverture du défilé militaire du 17 août

Le chef de l'Etat Ali Bongo Ondimba a présidé le défilé militaire du 17 août au Gabon © DR

Au lendemain de la fête de l’indépendance gabonaise, la radio française, très diffusée dans le pays, est pointée du doigt. Explication.

Les faits sont précis. Et ils n’ont pas échappés à la vigilance de ceux qui sont chargés, au Gabon, de la régulation des médias.

RFI, la radio française, diffusée dans tout le pays, est taxée de parti pris et même de fake news. En cause ? Sa couverture, jugée partiale et en partie inexacte, du défilé militaire qui s’est déroulé samedi 17 août, jour de la fête de l’indépendance.

A l’appui de ces récriminations, deux articles sont excipés. Le premier, paru le 17 août sous le titre : Ali Bongo au défilé de la fête nationale, réserve une place égale au discours du président de la République, Ali Bongo Ondimba, et à Jean Ping. Ce dernier clame depuis 2016 sa victoire à l’élection présidentielle. Problème : il n’est reconnu ni au niveau national, ni au niveau continental, ni international.

« Il n’y a qu’au Gabon que l’on se permet ça. Prenez l’exemple de la RDC. Est-ce que RFI accorde une place égale à celui que la communauté internationale reconnait comme le président légitime, Félix Tshisekedi, et à celui qui se revendique comme le président élu, Martin Fayulu ? La réponse est non. Alors pourquoi une telle différence de traitement au Gabon ? », s’interroge un proche du président de la Haute Autorité de la Communication (HAC), le « gendarme » des médias, ajoutant : « On ne peut professionnellement, déontologiquement parlant, réserver un traitement égal à ce qui est officiel et à ce qui relève de l’auto-proclamation. le journaliste peut avoir son parti pris, mais il ne saurait se substituer aux institutions pour suggérer, indirectement, qui est légitime et qui ne l’est pas»

Au reproche de parti pris s’en ajoute un autre : celui de fake news. Dans ce même article, RFI évoque la « maladie » du président. Or, selon diverses sources, le président gabonais aurait été victime le 24 octobre 2018 d’un AVC – une information jamais officiellement confirmée – dont les séquelles s’estompent peu à peu. Mais « en aucun cas, il ne s’agit d’une maladie. Sur quelle base RFI s’appuie-t-elle pour affirmer une telle chose ? », se demande, interloqué, ce proche du président de la HAC.

Un autre article, publié quelques heures plus tard ce samedi 17 août, sous le titre : Le défilé de la fête nationale dominé par la présence d’Ali Bongo, fait l’objet des mêmes reproches. Le parti pris journalistique d’abord. Après avoir dépeint d’une façon singulière l’arrivée du président à la tribune à l’occasion du défilé militaire (« Traînant son pied droit, Ali Bongo s’est immobilisé… »), le reportage se conclut sur un commentaire de 38 secondes, soit la moitié de sa durée totale.

Celui qui parle est présenté comme une figure de l’opposition. Or, il ne s’agit ni de Jean Ping, ni de Guy Nzouba Ndama, ni même d’Alexandre Barro Chambrier, mais de… Jean Gaspard Ntoutoume Ayi, considéré au Gabon comme un second couteau. A preuve, lors des dernières élections législatives à Akanda, au nord de Libreville, celui-ci n’était pas parvenu à franchir la barre du premier tour des élections législatives et son parti, l’Union nationale, dont il n’est pas le président (il s’agit de Zacharie Myboto) ne dispose que de deux députés à l’Assemblée nationale, contre 5 pour le RPM et 11 pour Les Démocrates.

Si la voix de l’opposition se fait ainsi entendre, aucun des partisans du président n’est en revanche interrogé pour livrer son analyse.

A ce reproche de parti pris, s’ajoute, ici aussi, celui de fake news. Le journaliste de RFI qu’ « à aucun moment, (le président Ali Bongo) ne s’est levé, comme autrefois ». Ce qui est totalement faux. Comme l’ont indiqué plusieurs sources concordantes, confirmées par notre correspondant sur place, le chef de l’Etat gabonais s’est levé à plusieurs reprises.

« On voit bien l’objectif sous-jacent de ce type de reportages. Insinuer l’idée que le président, supposément malade, serait inapte à exercer sa fonction et que, partant, la contestation serait grande dans le pays. Ces affirmations sont purement gratuites. Elles ne reposent sur rien d’objectif », déplore le proche du président de la HAC.

« La liberté d’informer n’est pas la licence de raconter n’importe quoi. Les médias, quels qu’ils soient, peuvent avoir un parti pris. Mais en ce cas, ils doivent clairement afficher la couleur et ne pas se présenter comme neutre au risque de tromper le lecteur, l’auditeur ou le téléspectateur. Et en aucun cas, il ne peuvent travestir la réalité. Sinon, ils seront sanctionnés », prévient cet homme influent qui précise : « En la matière, si des fautes ont été commises, quel que soit le média concerné, il n’y aura pas d’impunité»