Dans un article publié ce mardi sous le titre « Bonne gestion de la Covid-19 : Le Gabon absent….du Top 20 africain ! », le site d’information en ligne Direct Infos a cru pouvoir s’appuyer sur une étude publiée par le Lowy Institute pour conclure que le pays aurait eu des performances médiocres en matière de riposte contre la Covid-19. Il s’est aussitôt fait reprendre par le porte-parole de la Présidence, étude de… l’OMS à l’appui.
« Alors que le gouvernement gabonais s’autofélicite de sa gestion ‘exceptionnelle’ de la pandémie de la Covid-19, certains organismes spécialisés semblent totalement l’ignorer », a cru bon d’ironiser le site d’information en ligne Direct Infos Gabon.
« C’est le cas du dernier rapport du Lowy Institute dont la nouvelle étude couvre 98 pays, et porte sur la capacité des Etats à répondre efficacement à la pandémie qui est apparue en Chine à la fin de l’année 2019 », précise le média en ligne.
« D’après les conclusions de ce rapport, le Gabon ne fait pas parti du top 20 africain », conclut Direct Infos en prenant soin de mettre en gras cette assertion.
Mal lui en a pris. Aussitôt publié cet article a été repris à la volée par le porte-parole de la Présidence qui s’appuie, lui, sur des sources autrement plus fiables : celles de l’Organisation mondiale de la Santé qui classe le Gabon parmi les pays les plus efficaces en matière de riposte face à la pandémie.
« Je vous invite à regarder le rapport de l’Organisation mondiale de la Santé sur les différentes statistiques pour avoir l information complète », écrit Jessye Ella Ekogha sur son compte Twitter.
Mais le pire pour Direct Infos est à venir. « De plus, sur le rapport que vous citez, ils déclarent eux même qu’ils ont fait une sélection de 98 pays et non de tous les pays », indique le porte-parole de la Présidence.
Je vous invite à regarder le rapport de @WHO sur les différentes statistiques pour avoir l information complète. De plus, sur le rapport que vous citez, ils déclarent eux même qu’ils ont fait une sélection de 98 pays et non de tous les pays. @magaranb https://t.co/dzPyIG0oHl pic.twitter.com/z7lFHA5NZV
— Jessye Ella Ekogha (@JessyeElla) February 2, 2021
Ainsi, si le Gabon n’apparait pas dans le classement, c’est parce qu’il ne figure tout simplement pas dans le panel de l’étude ! En langage journalistique, c’est ce qui s’appelle une bourde.
Car la réalité est tout autre. Comme l’indiquent clairement les derniers chiffres rendus publics par l’OMS au sujet du Covid-19 en Afrique (« Covid-19 pandemic in the WHO african region: epidemiological analysis », janvier 2021), le Gabon figurent dans le top 5 des pays qui gèrent le mieux l’épidémie de Covid-19. Il fait notamment partie des pays qui testent le plus leur population, l’un des points de comparaison les plus objectifs pour évaluer le niveau de riposte, explique l’OMS. En Afrique centrale, le Gabon occupe même, et de loin, la première place, ce qui ne va pas sans conséquence (lire notre article).
Un article emblématique de la dérive de certains médias en ligne
En attendant, cet article est emblématique d’une forme de dérive qui touche les médias en ligne gabonais et que la Haute autorité de la communication (HAC) a dénoncé pas plus tard que la semaine dernière (lire notre article).
En l’espèce, la simple lecture de la note méthodologique aurait suffit à présenter l’étude d’une toute autre manière que celle, péjorative, qui est faite et qui vient nourrir le torrent de Gabon bashing qui déferle chaque jour sur les médias en ligne gabonais. Quant à la consultation des chiffres de l’OMS, faciles d’accès, elle aurait permis une présentation tout à fait différente, autrement plus conforme à la réalité.
Face à ce qu’elle perçoit comme une « dérive », la Haute autorité de la communication, qui s’est remobilisée il y a quelque temps après une période de relative inactivité, a été mise en alerte.
Outre les traditionnelles sanctions (suspension, etc.), une solution pourrait résider dans l’obligation faite au média de publier sur leur « une » un rectificatif. Une pratique, plus « soft » que les sanctions et les recours en justice, qui s’apparente à une forme de « name shaming » et qui a fait ses preuves ailleurs, poussant les médias à plus de rigueur et d’objectivité. Sans doute une piste à prospecter pour permettre au journalisme de conserver ses lettres de noblesse.