Environnement : Les éco-gardes gabonais, vedettes du World ranger day 2020

Les éco-gardes gabonais entourant leur patron, Hubert Ella Ekogha (au centre, avec des lunettes) © DR

Comme chaque 31 juillet, ce vendredi, le monde célèbre le World ranger day. L’occasion de rendre hommage à toutes celles et ceux qui œuvrent en faveur de la protection de la faune et de la flore, parfois au péril de leurs vies. Cette année, les éco-gardes gabonais sont à l’honneur. 

Si le Gabon est considéré comme l’un des pays les plus en pointe en matière de défense de l’environnement, ça n’est pas seulement parce que son territoire est recouvert à 85 % par la forêt équatoriale, l’un des deux poumons verts de la planète, ni parce que sa diplomatie est très active en matière de défense du climat et de la biodiversité (le pays préside le Groupe des négociateurs africains en faveur du climat).

C’est aussi grâce à ses bataillons d’éco-gardes, le nom donné aux gardes-forestiers qui veillent sur les 13 parcs nationaux, des aires 100 % protégées. Parfois même, au péril de leur vie. Car les braconniers n’hésitent pas à les prendre pour cible.

Il faut dire que le Gabon accueille plus de la moitié des 80.000 éléphants de forêt que compte le continent africain, par opposition aux éléphants de savane. Gorilles, buffles, panthères et autres grands mammifères y ont également trouvé refuge. Or, que ce soit pour les uns pour leur ivoire, pour les autres pour leurs cornes ou leur viande, ces espèces sont les plus ciblées par les braconniers.

« Nous ne nous battons pas pour le Gabon seulement », Hubert Ella Ekogha

« Nous ne nous battons pas pour le Gabon seulement. Mais pour le reste du monde. Car toute cette biodiversité appartient au patrimoine mondial de l’humanité. C’est ce que je rappelle chaque jour à mes hommes », explique Hubert Ella Ekogha, le directeur technique de l’Agence national des Parcs nationaux (ANPN) qui dirige l’équipe des éco-gardes gabonais.

Il ne s’agit pas, loin de là, d’un slogan. La forêt équatoriale a beau ne recouvrir que 2 % de la surface terrestre, elle abrite la moitié de la biodiversité mondiale, hors espèces maritimes. Leur nom de « sanctuaire » n’est donc pas usurpé.

Et c’est aussi ce qui explique le fait que le Gabon a décidé de livrer une « guerre totale » contre les braconniers et trafiquants en tout genre, selon les propres termes du président gabonais Ali Bongo Ondimba. Connu pour son engagement tous azimuts en faveur de la protection de l’environnement, le chef de l’Etat gabonais a dégagé d’importants moyens en matière de lutte anti-braconnage.

Avant son arrivée au pouvoir en 2009, il n’y avait quasiment aucune surveillance en la matière. Aussi le président a-t-il considérablement augmenté la présence de gardes dans les 13 parcs du pays. Dès le début de son premier mandat, au tournant des années 2010, M. Bongo Ondimba a multiplié les actions coup de poing, faisant publiquement brûler des stocks d’ivoire issus du braconnage, ordonné saisies et arrestations et durci les sanctions contre les trafiquants.

Le nouveau Code pénal gabonais, adopté en deux temps, en juillet 2019 puis en juillet 2020, a ainsi rendu beaucoup plus sévère les peines encourus en cas de braconnage. Une revendication de longue date des défenseurs de l’environnement, au Gabon comme à l’international.

Sur terre et sur mer

« Ce durcissement des sanctions était nécessaire car le trafic est particulièrement lucratif. Il faut donc être suffisamment dissuasif pour en limiter l’ampleur », indique une source judiciaire. Une fois en Chine, où s’exporte clandestinement la moitié environ de l’ivoire braconnée au Gabon, le prix atteint 1.000 voire 2.000 euros le kg. Le reste atterrit ailleurs en Asie, en Europe ou aux Etats-Unis, avec des marges tout aussi conséquentes.

Mais l’action des éco-gardes gabonais ne se limite pas, loin de là, à la défense des grands mammifères terrestres. Il lutte également contre la pêche clandestine, notamment dans la mangrove où nombre d’espèces protégées viennent déposer leurs œufs.

« Quand nous attrapons des braconniers, nous saisissons leurs pirogues, leurs filets et tout leur matériel. Y compris les poissons pêchés illégalement. Ces poissons, nous les donnons à des orphelinats », dit Hubert Ella Ekogha.

Comme pour la forêts, les eaux gabonaises couvrent une large surface. « Le Gabon a 850 km de côte. Il est donc impossible de surveiller parfaitement une telle étendue », déplore le chef des éco-gardes, « même s’il assure faire, avec (ses) hommes, de son mieux ».

Les résultats sont là

Son action porte ses fruits. Certaines espèces, menacées de disparition, connaissent un regain de forme. « Leur population ne décline plus, comme pour les grands singes. Elle a même tendance à augmenter », se réjouit un scientifique qui travaille au sein du Word Wildlife Fund (WWF).

« En réalité, nous nous battons pour nos enfants. D’ici cinq ans, ceux-ci doivent considérer comme normal le fait de voir des baleines, des tortues, des éléphants. Nous mènerons ce combat jusqu’au bout. Il nous est interdit d’abandonner », lâche en conclusion Hubert Ella Ekogha dont le nom revient désormais avec insistance, au Gabon comme à l’international, pour assurer la direction d’organismes prestigieux dédiés à la défense de l’environnement.