Mardi 6 septembre, le commandant en chef des Forces de police nationale (FPN) a annoncé l’interdiction des contrôles routiers intempestifs partout au Gabon. Désormais, les agents des forces de l’ordre affectés sur la voie publique se limiteront à la régulation de la circulation routière. L’objectif : mettre un terme au racket et la corruption subis par les conducteurs. Une décision, particulièrement attendue par les populations, qui intervient quelques semaines à peine après que le chef de l’Etat, lors du Conseil des ministres du 10 août et dans son discours le 16 août, a tapé du poing sur la table.
En politique, Ali Bongo Ondimba croit au volontarisme, non à la fatalité.
Alors que le racket et la corruption des agents des forces de l’ordre semblaient être, tel un phénomène naturel, un mal inexpugnable au Gabon, le président de la République a décidé de prendre le taureau par les cornes et d’y mettre un terme définitif.
Lors du Conseil des ministres le 10 août dernier, le chef de l’Etat gabonais a poussé une soufflante. « Il est entré dans une colère noire », confirme un ministre. Raison de son courroux : le manque d’efficacité du gouvernement.
Dans son viseur en particulier, le ministre des Travaux publics, Armel Bounda Balonzi (lire notre article) mais également celui de l’Intérieur, Lambert-Noël Matha.
« Le président est excédé par les faits de racket et de corruption de la part des agents des forces de l’ordre qui sont positionnés sur la voie publique. Il a exigé à plusieurs reprises qu’il y soit mis un terme définitif. Or, ça n’est toujours pas le cas. Ça risque de chauffer », avertissait début août, juste avant ce Conseil des ministres, un membre de son entourage.
Dans son discours prononcé quelques jours plus tard, le 16 août, à la veille de la fête de l’Indépendance, le numéro un gabonais n’avait pas hésité à aborder le sujet. « Je n’ignore rien de certaines pratiques intolérables qui ont cours dans les rues de la capitale et des grandes villes de province », avait-il déclaré sans langue de bois, ajoutant qu’ « à ce sujet, (il a) à nouveau donné il y a quelques jours des consignes d’extrême fermeté. Pour que les quelques brebis galeuses soient sanctionnées et séparées du reste du troupeau. L’attitude inacceptable et condamnable de quelques-uns ne saurait jeter l’opprobre sur la grande majorité. Et le président d’avertir : « vis-à-vis de ceux qui enfreignent la loi, qui foulent au pied la déontologie professionnelle, il faut être d’une extrême sévérité. Je veillerai à ce que ce soit le cas. »
Trois semaines après ces déclarations pour le moins martiales, mardi 6 septembre, le commandant en chef des Forces de police nationale (FPN) annonçait l’interdiction des contrôles routiers intempestifs partout au Gabon.
« Suite aux nombreuses plaintes des usagers sur des cas de corruption et de racket, il est rappelé à l’attention de tous les policiers que les contrôles routiers intempestifs sont interdits sur toute l’étendue du territoire national, sauf cas de force majeure et instruction du commandant en chef », indiquait le général de division Serge Hervé Ngoma dans une circulaire publiée à cet effet.
Celui-ci ajoutait que « dans l’accomplissement de leurs missions régaliennes, les services de police chargés de la voie publique se limiteront désormais à la régulation de la circulation routière et, le cas échéant, à la verbalisation des usagers en cas d’infraction dûment constatée ».
Sanctions rapides et radicales
Pour s’assurer que ces consignes soient effectivement mises en œuvre, les sanctions prévues sont rapides et radicales. « Tout policier réfractaire aux présentes dispositions et pris en flagrant délit de contrôle sera immédiatement présenté devant un conseil extraordinaire qui statuera sur sa révocation, de même qu’elle engagera la responsabilité du chef hiérarchique direct », a prévenu le général de division Serge Hervé Ngoma.
Ce dernier point est déterminant. Le fait que l’agent sur le terrain ne soit pas le seul à être sanctionné mais que son responsable hiérarchique puisse l’être aussi devrait changer radicalement la donne. « C’est la première fois qu’une telle méthode est mise en œuvre. C’est un changement de paradigme qui laisse espérer que cette fois-ci, les résultats seront au rendez-vous », explique un spécialiste des questions de sécurité. En attendant des mesures précises et fiables, les premiers signes d’une baisse significative du nombre de contrôles anarchiques ont été constatées ces deux derniers jours au sein du Grand Libreville. Prometteur.