[Vidéo] En pleine crise du Covid-19, Omar Denis Junior Bongo, poussé par Denis Sassou Nguesso, franchit la frontière pourtant fermée entre le Congo et le Gabon pour venir serrer des mains à Bongoville

Omar Denis Junior Bongo ce vendredi 20 mars 2020 à Bongoville dans le Haut-Ogooué © impression écran (vidéo)

Ce vendredi 20 mars, alors que la crise du coronavirus frappe l’Afrique centrale comme toutes les régions du monde, Omar Denis Junior Bongo a quitté Brazzaville, la capitale du Congo, pour se rendre de l’autre côté de la frontière, pourtant fermée, à Bongoville. Arrivé sur place, il a serré les mains de dizaines d’habitants venus l’accueillir. Une attitude jugée scandaleuse au moment où les autorités demandent aux Gabonais de faire preuve de civisme et de responsabilité.

La scène est filmée. Et la vidéo, qui circule sur les réseaux sociaux, ne laisse d’interpeller.

Ce vendredi 20 mars, Omar Denis Junior Bongo s’est rendu à Bongoville dans le Haut-Ogooué (sud-ouest du Gabon). En grande pompe. Pour l’occasion, le jeune demi-frère du président Ali Bongo Ondimba est venu accompagné d’un cortège d’une quinzaine de 4×4 rutilants et d’une trentaine de personnes, dont de nombreux gardes du corps.

En d’autres circonstances, sa venue aurait pu passer inaperçue. Sauf que les circonstances sont, à l’heure actuelle, tout sauf normales. En effet, l’Afrique centrale, à l’instar de l’ensemble des régions du monde, fait face à la pire crise sanitaire que le monde a connu depuis un siècle. Pour se protéger, les Etats ont pris un certain nombre de mesures, en particulier le bouclage total des frontières terrestres. C’est le cas notamment du Gabon. Dans ces conditions, nombreux se demandent comment Omar Denis Junior Bongo a-t-il pu franchir la frontière ?

A cette première polémique s’en ajoute une seconde. Une fois sur place, à Bongoville, on voit l’intéressé se précipiter vers un groupe d’habitants, un comité d’accueil préparé pour la circonstance, et les saluer un par un. Une image provocante pour les Gabonais au moment où les autorités diffusent à longueur de journée des messages visant à faire respecter les règles de distanciations sociales, au premier rang desquels figure… l’interdiction du serrement de main.

Cette attitude inconséquente est à l’origine d’une vague d’indignation au Gabon alors que la vidéo de la venue à Bongoville d’Omar Denis Junior Bongo circule allègrement. « L’attitude de ce monsieur est totalement irresponsable. Violer les frontières et s’affranchir des mesures barrières en pareille circonstance dépassent l’entendement. Comment peut-on être aussi inconséquent ? Est-ce cet exemple là que nos élites doivent donner à la population ? », fait mine de s’interroger, dépité, un médecin de l’Hôpital d’instruction des armées Omar Bongo à Akanda, là où sont soignés au Gabon les malades du Covid-19.

Si celui-ci s’en tient au seul registre sanitaire, il y a aussi, semble-t-il, un volet politique à l’affaire. Qu’est donc venu faire Omar Denis Junior Bongo à Bongoville ? Si certains évoquent une possible candidature à l’élection présidentielle en 2023, celle-ci semble peut probable en raison du jeune âge de l’intéressé (26 ans) et de son inexpérience totale de la chose publique.

D’autres, en revanche, avancent une explication plus crédible, à l’instar de ce diplomate occidental en poste depuis plus de deux ans à Brazzaville. « Le président congolais, Denis Sassou Nguesso, a fait d’Omar Denis Junior Bongo, dont il est le grand-père, son poulain, pour ne pas dire sa marionnette (…) C’est un secret de polichinelle. Sa volonté de s’immiscer dans la prochaine présidentielle au Gabon ne fait aucun doute (…) Il se sert de Denis Omar Bongo pour tenter de capter le vote Téké et Obamba et venir perturber le jeu électoral », explique cet ambassadeur réputé pour sa finesse d’analyse.

Mais à quelle fin, lui demande-t-on ? La réponse fuse. « Le Congo est dans une très mauvaise passe économique. Il a besoin du soutien du FMI. Mais pour augmenter ses recettes, les réformes sont nécessaires mais insuffisantes. Et le pétrole, la principale richesse du pays, ne suffit plus. Les réserves congolaises s’épuisent et les cours mondiaux sont aujourd’hui au plus bas en raison de la guerre que se livrent l’Arabie Saoudite, la Russie et les Etats-Unis. Du coup, Denis Sassou Nguesso réactive son vieux rêve d’accaparement des ressources minières du Haut-Ogooué, province qui se situe à la frontière avec son pays et sur laquelle il a toujours lorgné », explique le diplomate.

En effet, le Haut-Ogooué, qui abrite notamment la mine de Moanda, est l’un des principaux producteurs mondiaux de manganèse. « N’allez pas chercher ailleurs les raisons de la venue vendredi dernier d’Omar Denis Junior Bongo dans la province », recommande cet ambassadeur en guise de conclusion à notre entretien.

Reste que son timing (en pleine crise du Covid-19) et les moyens choisis (franchissement illégal de la frontière et non respect des mesures barrières) sont plus que douteux. Omar Denis Junior Bongo et son parrain et grand-père, Denis Sassou Nguesso, pensaient faire un coup. Ils ont récolté une bonne polémique. En pleine crise du Covid-19, les Gabonais s’en seraient bien passés.