Ce qui a le don d’agacer les autres figures de l’opposition, dont Jean Ping, Alexandre Barro Chambrier et Zacharie Myboto.
Le responsable des questions budgétaires au sein de l’Union Nationale (UN) ne cache plus ses ambitions. Celui qui fut porte-parole de Jean Ping durant la campagne présidentielle de 2016 est le candidat commun de l’UN et du RHM aux élections législatives des 6 et 27 octobre prochain dans le deuxième arrondissement à Akanda, une commune résidentielle du nord de Libreville.
Rien n’est joué d’avance dans cette élection. Jean Gaspard Ntoutoume Ayi aura notamment face à lui Joseph Minko Olenga du Parti Démocratique Gabonais (PDG, au pouvoir), le fils de l’ex-ministre des domaines, du cadastre et de l’habitat sous Omar Bongo. Mais ce diplômé de l’ENA en France, passé par la Banque Mondiale, « n’est pas homme à douter », comme le relève avec une pointe d’ironie l’un de ses camarades au sein de l’UN. Sûr de sa victoire, il a déclaré samedi 28 septembre lors d’une de ses causeries à Château d’eau, un quartier du deuxième arrondissement d’Akanda, « mon élection ne se fera pas à deux tours ». Un propos qui ne manquera pas d’apporter de l’eau au moulin de ceux qui jugent cet homme d’à peine 50 ans à la tête bien faite « suffisant » et « arrogant ».
Mais Jean Gaspard Ntoutoume Ayi ne se contentera pas d’un « simple poste de député », comme il l’a fait savoir à son entourage. Il vise beaucoup plus haut. Une fois élu, ce qui ne fait pour lui aucun doute, il escompte prendre la présidence d’un groupe de large rassemblement de l’opposition au sein de l’assemblée nationale. Une première étape pour briguer ensuite le leadership politique au sein de l’opposition gabonaise et se porter candidat à l’élection présidentielle de 2023. « Son destin est tout tracé », veut croire un de ses amis, qui explique que « Jean Gaspard est certain d’avoir l’étoffe d’un leader et il est sûr de sa bonne étoile. »
Grincement de dents chez les principaux leaders de l’opposition
C’est peut dire qu’au sein de l’opposition, les ambitions de Jean Gaspard Ntoutoume Ayi font grincer des dents. Zacharie Myboto, le président de l’Union Nationale dont il est membre, s’inquiète de plus en plus de ce jeune rival qui n’hésite pas à critiquer en privé le fonctionnement clanique du parti (Chantal, la fille de Zacharie, en est la trésorière).
Alexandre Barro Chambrier, avec qui il a pourtant fait une alliance de circonstance à l’occasion de ce scrutin législatif, est encore plus inquiet. Convaincu que c’est à lui que doit revenir le statut de leader de l’opposition à l’issue des élections d’octobre, le président du Rassemblement Héritage et Modernité s’agace des ambitions ouvertement affichées par le responsable de l’UN. « Nous devrions d’abord en parler ensemble et ensuite tenir un même discours », a-t-il déclaré, passablement énervé, cette semaine à quelques proches.
Reste Jean Ping, considéré, sans doute pour quelques semaines encore, comme le leader de l’opposition. « C’est un leader en sursis », corrige aussitôt un conseiller de Jean Gaspard Ntoutoume Ayi qui fait valoir l’âge du patron de la Coalition pour la Nouvelle République. « Il aura 81 ans en 2013, date de la prochaine élection présidentielle au Gabon. Sa carrière est derrière lui. Il doit transmettre le témoin et le faire après les élections pour permettre à d’autres de se préparer à affronter dans les urnes Ali Bongo Ondimba », indique un autre de ses lieutenants.
Depuis 2016, Jean Gaspard Ntoutoume Ayi, l’ex-porte-parole de Jean Ping, s’est largement émancipé. Il a passé outre les consignes fermes de boycott que son ex-mentor a vainement tenté de faire passer à l’occasion des scrutins d’octobre. Il est vrai qu’en politique, pour réussir, il faut savoir tuer le père.