« Pandora Papers » : Quelques noms et beaucoup de questions…

Révélée le 4 octobre 2021, l'enquête sur les Pandora papers soulèvent de nombreuses interrogations © DR

Un roi, sept présidents et quatre premiers ministres en exercice. Des centaines de responsables politiques issus de plus de 90 pays. La liste des personnalités politiques qui apparaissent dans les « Pandora Papers » ressemble à un véritable catalogue à la Prévert. Pourtant, à peine rendues publiques, ces « révélations », basées sur 12 millions de documents confidentiels sur les paradis fiscaux obtenue par le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) et épluchée pendant plus d’un an par 150 médias internationaux, soulèvent déjà de nombreuses questions. Quitte à fortement amoindrir l’effet spectaculaire recherché en l’espèce. 

Immoral peut-être, mais pas illégal

La première question soulevée par ces Pandora Papers est la confusion – volontairement entretenue ? – sur le statut des faits allégués. Il s’agit ici de montages financiers organisés via des paradis fiscaux. Or, si chacun peut avoir sur la question son avis sur un plan moral, sur le strict plan du droit, de tels montages ne sont pas illicites. Ils sont même monnaies courantes pour des entreprises comme Google, Facebook ou autres, dont les services sont – sans doute – quotidiennement utilisés par les journalistes à l’origine de ces « révélations.

Optimisation fiscale et non détournements d’argent public

D’autre part, et c’est la deuxième confusion, il ne s’agit pas en l’espèce de détournements de fonds publics mais d’optimisation fiscale. Ici aussi, chacun peut avoir son avis sur le plan moral. Reste que sur le plan juridique, il n’y a pas d’irrégularité. D’ailleurs, les personnalités clouées aujourd’hui au pilori dans ces Pandora Papers ne font que ce que les multinationales, dont tout le monde consomme sans avoir à y redire les services et les produits, pratiquent depuis longtemps.

Un deux poids deux mesures ? 

Autre interrogation soulevée par ces Pandora Papers, la surreprésentation des Africains, décidément une proie bien facile pour les médias occidentaux. Sur les 336 personnalités épinglées, 43 sont africaines – dix d’entre eux sont du Nigeria, pays le plus représenté, suivi par l’Angola avec neuf responsables politiques incriminés et cinq pour la Côte d’Ivoire -. Soit 12,8 % du total alors que le continent représente mois de 2 % du PIB mondial. Une disparité (la même que celle observée à la CPI…) qui laisse d’autant plus songeur que certaines zones du monde, où hommes politiques et d’affaires prospèrent, sont elles curieusement épargnées…

On s’acharne sur les uns, on épargne les autres

Dans la même veine, on peut également s’étonner quant aux critères choisis par les auteurs de « l’enquête » pour épingler leurs « victimes ». Dans le cas du Gabon, par exemple, pays cité parmi de nombreux autres, on peut s’étonner en particulier que le nom de Jean Ping, qui a fait toute sa carrière en politique à une époque où la transparence n’était pas autant de mise qu’aujourd’hui et qui est à la tête d’une fortune manifeste, n’y figure pas. Son statut d’opposant – fut-il acquis sur le tard – le protégerait-il ? Quoi qu’il en soit, de telles omissions sont de nature à semer le trouble sur les véritables motivations de ces « révélations ».

Un mélange de grains et d’ivraies

Enfin, sans être exhaustif, on peut également s’interroger sur le procédé consistant à mettre dans le même sac, pour le dire trivialement, des personnalités épinglées pour quelques centaines de milliers de dollars et d’autres qui le sont pour plusieurs dizaines de milliards de dollars. C’est le cas par exemple du Gabon où les montages pointaient du doigts sont minimes sur le plan financier par rapport à ceux mis à jour dans d’autres pays, comme au Congo-Brazzaville voisin par exemple.

En outre, il ressort clairement, dans le cas gabonais, que les sociétés utilisées n’ont « jamais servi de support à la moindre évasion fiscale, à la moindre transaction illicite, au moindre détournement de fonds publics, à la moindre activité illégale ». Les Pandora Papers ne décèlent rien, absolument rien, de tel.

Mais, et les auteurs de l’enquête le savent, qui prendra la peine de vérifier ? D’éplucher réellement les milliers de pages que constituent ces Pandora Papers ? La plupart des gens se contenteront de lire quelques tweets ou (pseudo-)articles sur internet et n’en retiendront que des bribes. En attendant, le mal est fait : la réputation de certaines personnalités s’en trouvent, largement à tort, ternie. Au fond, peut-être était-ce là le véritable objectif véritable de cette « enquête »…