L’Union européenne tourne définitivement la page de la présidentielle de 2016 au Gabon et douche les derniers espoirs de Jean Ping

La présidente de la Commission européenne, Ursula Von der Layen © DR

Refroidies au lendemain de la proclamation des résultats de la présidentielle de 2016, les relations bilatérales entre le Gabon et l’Union européenne (UE) ne cessent de se réchauffer depuis novembre 2019. Les membres du gouvernement gabonais et la délégation de l’UE se sont derechef concertés pour clore tous les sujets ayant trait à la présidentielle de 2016. Concurrencé par Pékin, Washington et Moscou, Bruxelles veut se tourner vers le futur. Un coup dur pour Jean Ping qui voit s’envoler ses derniers espoirs de reconnaissance de victoire. 

Une nouvelle réunion a eu lieu, le 18 décembre dernier, entre le gouvernement gabonais et les membres de la délégation de l’Union européenne (UE). Celle-ci clôt un cycle de réunions, rouvert en fin d’année dernière, dans le cadre du dialogue politique intensifié entre les deux parties.

Les travaux ont notamment porté sur le traitement « des détentions irrégulières, particulièrement des détentions provisoires en dépassement des délais légaux liés ou non aux violences postélectorales de 2016 et les potentielles réparations dues aux victimes éventuelles de celles-ci », selon un reportage de la chaine de télévision Gabon Première diffusé le 4 janvier 2020.

Bruxelles entend en effet clore rapidement ce chapitre de ses relations avec le Gabon. « Le Gabon est un pays stratégique. Il est l’un des rares à être vraiment stable en Afrique centrale. Il joue par ailleurs un rôle très positif sur la scène continentale dans les opérations de maintien de la paix, ainsi qu’au niveau international où son implication en faveur du climat est sans équivalent sur le continent », confie un ambassadeur en poste dans la capitale gabonaise qui souligne que le pays « ressort renforcé » de la crise de la Covid-19. « En Afrique, il est incontestablement l’un des plus efficaces dans la riposte », insiste-t-il.

Libreville est également bien perçu du fait de son action en faveur de la promotion des femmes. « C’est un sujet important pour nous », confesse une diplomate au sein du Service européen d’action extérieure de l’UE. « En Afrique subsaharienne, le Gabon est, avec l’Ethiopie et le Rwanda, l’un des trois pays les plus avancés sur ce plan », souligne-t-elle.

« L’opposition gabonaise doit regarder à travers le pare-brise, non le rétroviseur »

Pour certains observateurs, Bruxelles n’a tout simplement pas eu le choix et aurait agi par pragmatisme. « En campant sur des positions pas toujours bien comprises au-delà de l’Occident, l’UE a pris le risque de se voir déborder par les Etats-Unis, la Chine, la Russie, mais aussi les pays d’Asie du sud-est et du Moyen-Orient qui ont renforcé leurs positions ces dernières années dans le pays tant d’un point de vue diplomatique qu’économique. L’UE a donc été contrainte d’en rabattre au risque d’accélérer sa perte d’influence », explique un expert au sein de la Brookings Institution, un grand think tank américain.

Sur le plan politique, le coup est rude pour Jean Ping. L’ex-chef de file de l’opposition, qui revendique toujours sa victoire lors de l’élection présidentielle d’août 2016, voit s’envoler ses derniers espoirs de reconnaissance internationale. « A deux ans et demi de la prochaine présidentielle, cela n’aurait aucun sens. L’opposition gabonaise désormais doit regarder à travers le pare-brise et non plus dans le rétroviseur », conseille un diplomate au sein de la Division Afrique centrale du Quai d’Orsay, le ministère français des Affaires étrangères. Manière de dire qu’elle doit se tourner vers l’avenir plutôt que de ressasser vainement le passé.