Légalité des mesures anti-Covid au Gabon : Pourquoi Denise Mekam’ne a raison face aux parlementaires de l’opposition

Le ministre d'Etat, chargé des relations avec les institutions constitutionnelles, Denise Mekam'ne © DR

Dans un communiqué diffusé le 2 février dernier, la quinzaine de parlementaires proches de l’opposition qui entendaient déférer devant le Conseil d’Etat l’ordonnance habilitant le gouvernement à agir par décret en vue de prendre des mesures de lutte contre la Covid-19 ont, en dépit des explications très précises apportées par le ministre chargé des relations avec les institutions constitutionnelles, Denise Mekam’ne Edzidzie épouse Taty, persisté dans leur affirmation selon laquelle ces mesures auraient été prises dans l’irrespect de la procédure parlementaire et seraient donc illégales. En réalité, leur argumentaire, peut-être voué à leurrer l’opinion, ne tient pas sur un plan juridique. Explication.

Dans leur communiqué, ces parlementaires soutiennent que la Cour constitutionnelle n’effectuerait pas systématiquement un contrôle de constitutionnalité préalablement à la promulgation d’une loi.

C’est clairement méconnaitre (ou faire mine de méconnaitre ?) et la Constitution et la procédure parlementaire. Au Gabon, une loi ordinaire est soumise au contrôle de constitutionnalité, et même obligatoirement au regard de l’article 84 deuxième alinéa de la Constitution, qui précise que « la Cour constitutionnelle statue obligatoirement sur la constitutionnalité des lois organiques et des lois avant leur promulgation »… On a peine à croire que des parlementaires l’ignorent. Partant, il est permis de douter de leur bonne foi.

Dans leur communiqué daté du 2 février, ces parlementaires soutiennent par ailleurs qu’il serait trop tard désormais pour promulguer la loi. « Concernant le délai de vingt-cinq (25) jours  prévu par l’article 17 de la Constitution relative à la promulgation des lois, le Sénat ayant procédé à l’adoption de la loi de ratification de l’ordonnance N°012/PR/2021 du 11 mai 2021, le 23 décembre 2021, nous tenons à souligner qu’à la date de notre déclaration, le 25 janvier 2022, ce sont 33 jours qui se sont écoulés et donc bien au-delà du terme des 25 jours fixé par la Constitution pour la promulgation par le Président de la République des lois définitivement adoptées par le Parlement », soutiennent-ils dans leur communiqué.

Ici aussi, involontairement ou non, il y a méprise. En effet, sur la date de départ de la computation du délai de promulgation d’une loi, l’article 17 de la Constitution est on-ne-peut-plus clair. Ce délai court à compter de la transmission de la loi au Gouvernement et non de son adoption par le Parlement.

Il aurait donc suffit, ici aussi, aux parlementaires de relire la Constitution pour s’en convaincre. Celle-ci dispose en son article 17 que « le Président de la République promulgue les lois définitivement adoptées dans les vingt-cinq jours qui suivent leur transmission au gouvernement ». 

Car, en l’espèce, le premier ministre avait saisi la Cour constitutionnelle aux fins de contrôle de constitutionnalité de la loi portant ratification de l’ordonnance du 11 août 2021 par lettre du 5 janvier 2022. Ce n’est que le 13 janvier suivant que le gouvernement a été notifié par la Cour de la déclaration de constitutionnalité de la loi susvisée.

Contrairement à ce que soutiennent les parlementaires de l’opposition, décidemment bien peu au fait du droit constitutionnel et de la procédure législative, le président de la République n’était nullement forclos pour promulguer cette loi. Les mesures anti-Covid en vigueur au Gabon sont donc parfaitement légales.