Gabon : Sur TV5, l’avocat d’Ali Bongo donne une leçon de droit à celui d’Appel à agir

TV5 a organisé mercredi 28 août un débat sur la validité de la demande en justice d'expertise médicale visant le président gabonais © TV5/Impression écran

Appelé à remplacer au débotté l’opposant Jean Gaspard Ntoutoume Ayi qui venait de se désister à la dernière minute, l’avocat du collectif Appel à agir, Me Calvin Job, s’est montré à la peine face au très expérimenté avocat du président gabonais. 

Deux passages illustrent tout particulièrement les difficultés qu’a eues l’avocat d’Appel à agir à déployer son argumentaire juridique. Le premier concerne la hiérarchie des juridiction, méconnue en l’espèce par le premier président de la Cour d’appel de Libreville, le juge Akolly.

« Le Gabon est un Etat de droit. Le magistrat se doit d’obéir à la loi. (La juge Akolly) s’est écarté de son serment. Et la Cour de cassation qui est la juridiction suprême au Gabon a rendu une décision qui imposait à la Cour d’appel de surseoir à statuer. C’est une règle de procédure basique, élémentaire. (…) Or, nous avons saisi, avec mon confrère, la Cour de cassation. Et cette saisine emporte automatiquement le transfert du dossier de la Cour d’appel vers la Cour de cassation. De ce fait, la Cour d’appel est immédiatement dessaisie, a expliqué l’avocat du président gabonais », a clairement rappelé l’avocat du président gaboanis.

Or, pour Me Job, « faire appel à la Cour de cassation relève d’une volonté de neutraliser la justice. » Un argument pour le moins étonnant, manifestement spécieux, qui suscite un léger malaise sur le plateau… Ce à quoi Me Mavoungou rétorquera : « Il n’est pas question ici de raconter des inepties. La Cour de cassation est l’instance suprême. Dès lors qu’elle s’est prononcée, qu’elle a rendu une décision de sursis, la juridiction inférieure, la Cour d’appel en l’occurrence, doit s’y conformer. Sinon, on est plus dans un Etat de droit. Et d’ajouter avec insistance : Les juridictions ordinaires ne sont pas compétentes pour faire comparaître devant elle le chef de l’Etat. » 

Rebelote sur la question de la validité de la suspension de la Juge Akolly. « Cette décision trouve son fondement dans la loi portant statut des magistrats qui dispose que c’est le responsable de l’administration centrale du ministère de la Justice qui prend valablement la mesure conservatoire lorsque le magistrat s’est écarté de son serment, explique Me Mavoungou. Et celui-ci de préciser que « ça n’est pas la première fois que cela arrive au Gabon. » Ce à quoi Me Calvin Job, manifestement à court d’argument, ne trouvera rien à redire.

Peu à son aise durant le débat, l’avocat d’Appel à agir a éludé la question de l’intérêt à agir du collectif d’opposants dans le cadre de cette action en justice et s’est montré paradoxal, pour ne pas dire contradictoire, dans son argumentation sur la séparation des pouvoirs. Un principe constitutionnel qui prescrit justement qu’un juge, qui ressort de l’ordre judiciaire, ne peut convoquer un président de la République, plus haut représentant de l’Exécutif.

Enfin, Me Job a eu le plus grand mal à justifier ce qui est également perçu à tout le moins comme un paradoxe, voire une contradiction : alors que ses clients soutiennent que le Gabon n’est pas un Etat de droit (NDLR : entendu au sens occidental du terme), il recourt tout de même à la Justice, qui en est une des pièces maîtresses. Ici aussi, le téléspectateur a vainement attendu un début de réponse.