Gabon : les raisons du mini-remaniement ministériel

Réunion autour du chef de l'Etat, Ali Bongo Ondimba, le 15 janvier dernier © DR

Ce mercredi 30 janvier, le premier ministre, Julien Nkoghe Bekalé, a annoncé deux limogeages, une nomination et trois ajustements au sein de l’équipe gouvernemental. En voici les raisons.

Mini-remaniement, Réaménagement, ajustement. Les vocables ne manquent pas pour qualifier l’annonce faite aujourd’hui en milieu de journée par le premier ministre, Julien Nkoghe Bekalé. Une annonce qui intervient deux semaines seulement après l’entrée en fonction du nouveau gouvernement.

L’ex-ministre de l’Agriculture, Biendi Maganga Moussavou, retrouve son portefeuille après avoir été nommé le 12 janvier dernier au ministère de la Promotion des investissements, des Partenariats publics-privés et des PME PMI. « Cette décision est motivée par les sollicitations des acteurs du secteur satisfaits de son action lors de son passage. Ceux-ci ont souhaité le voir poursuivre l’impulsion qu’il a su insuffler et la stratégie mise en place », a expliqué Nanette Longa, la porte-parole du gouvernement sur sa page Facebook.

Le titulaire du portefeuille de l’Agriculture, Ali Akbar Onanga Y’Obeghe, quitte, quant à lui, le gouvernement. Élu député en octobre dernier, il devrait siéger à l’assemblée nationale.

En attendant, le portefeuille de Biendi Maganga Moussavou a été ventilé pour partie entre le ministre de l’Economie, Jean-Marie Ogandaga, et le ministre du Commerce, David Mbadinga.

En outre, le ministre de l’Eau et de l’Energie, Tony Ondo Mba, voit le périmètre de ses fonctions élargi aux Mines. Ce proche de Brice Laccruche Alihanga, le directeur de cabinet d’Ali Bongo Ondimba, connaît une ascension fulgurante. Élu député de Bitam en octobre dernier, il avait été nommé ministre pour la première fois le 12 janvier dernier. Il est désormais à la tête d’un super-ministère à la tête duquel il s’occupera des plus grands dossiers industriels du pays, notamment celui de la SEEG et de la COMILOG.

Volonté de renforcer la cohérence des portefeuilles ministériels

Qu’est-ce qui a, au fond, réellement motivé ce mini-remaniement ? Le souci de cohérence et d’efficacité répond la porte-parole du gouvernement. « Ce réaménagement devrait renforcer la cohérence des portefeuilles ministériels. Notamment la mise en cohérence de la stratégie énergétique avec la valorisation des ressources minières rattachées à l’Eau et à l’Energie ; le renforcement de la promotion des investissements qui sera désormais du ressort du ministère de l’Économie et la volonté de mettre en cohérence la politique de promotion des PME/PMI avec le Commerce », a précisé Nanette Longa cet après-midi sur sa page Facebook.

Mais le souci d’une plus grande cohésion au sein de l’équipe gouvernementale a probablement également compté. A preuve, le limogeage d’Étienne Massard, considéré comme l’un des piliers du gouvernement. Il est remplacé à son poste de ministre de la Défense par la maire de Libreville, Rose Christiane Ossouka Raponda.

L’entrée au gouvernement de la maire de Libreville est d’ailleurs le principal événement de ce mini-remaniement. Cette femme d’expérience, qui a déjà été ministre (du Budget), a un profil qui rassure. A la tête de Libreville qui concentre 65 % de la population du pays, cette proche de Marie-Madeleine Mborantsuo, a l’habitude de gérer de gros budgets et d’importantes administrations.

En outre, c’est une femme à poigne qui ne s’en laisse pas compter. « C’est important dans le contexte actuel, suite au coup d’Etat manqué du 7 janvier dernier, indique une source gouvernementale. « Il faut à la fois rassurer et ramener de la sérénité dans les armées », ajoute celle-ci.

Un gouvernement plus resserré, davantage féminisé et rééquilibré sur le plan ethnico-régional

Mais cette nomination s’inscrit également, selon plusieurs sources, dans la volonté du chef de l’Etat de poursuivre la promotion des femmes à des postes de responsabilité. Rose Christiane Ossouka Raponda est en effet nommée ministre d’Etat avec un portefeuille régalien. Elle est 7ème dans l’ordre protocolaire. « Jamais le gouvernement au Gabon n’aura compté autant de femmes ministres. Elles sont 11 au total, dont deux sont ministres d’Etat, 6 ministres de plein exercice et 3 ministres déléguées », fait observer un membre du gouvernement.

Ce gouvernement, qui compte 36 ministres au total au lieu de 38 auparavant, est également marqué par un rééquilibrage ethnico-régional. Deux ministres originaires du Haut-Ogooué quittent en effet le gouvernement (Etienne Massard et Christian Magnagna). On peut y voir là un effet de rattrapage par rapport à la nomination, le 11 janvier dernier, du bureau de l’Assemblée nationale où 5 des 9 principaux postes sont revenus à des Altogovéens.

Enfin, dernier point et non des moindres, « il n’y a aucun ministre protégé », fait-on savoir dans l’entourage du président. « Le chef de l’Etat exige des résultats, et, prévient-il, « si ceux-ci ne sont pas au rendez-vous, il en tirera les conséquences ». Les 36 membres du nouveau gouvernement sont prévenus.