Gabon : Pour marquer les dix ans de sa présidence, Ali Bongo Ondimba donne sa première interview depuis un an

Le président gabonais le 17 août 2019 à Libreville lors de la fête nationale © DR

Le 16 octobre 2009, à l’issue d’une élection présidentielle remportée quelques semaines plus tôt, Ali Bongo Ondimba prêtait serment et devenait le chef de l’Etat du Gabon. Dix ans plus tard, jour pour jour, l’heure est venue pour lui de dresser le bilan de ces dix années passées au pouvoir, mais aussi – et peut-être surtout – de tracer des perspectives pour l’avenir. Pour ce faire, le président a choisi le quotidien institutionnel gabonais L’Union. Sa première interview à la presse depuis un an.

Le propos est dense, riche. A la mesure de ses dix années passées à la tête du Gabon. Mais il est aussi précis et concret, jusqu’au détail. Et lucide, loin du plaidoyer pro domo ou de la dithyrambe.

D’emblée, Ali Bongo Ondimba tient à rassurer sur son état de santé et à mener à bien son mandat jusqu’à son terme, et peut-être au-delà. « Je me sens bien. Et de mieux en mieux chaque jour (…) Quand vous avez traversé pareille épreuve, vous prenez conscience de beaucoup de choses. Aujourd’hui, je suis plus que jamais déterminé à rendre à mon pays ce qu’il m’a donné (…) », déclare le président.

Que pense-t-il du bilan de ses dix années passées à la tête du pouvoir ? Le chef de l’Etat se fait mesuré. « Nous avons conduit ensemble des réformes majeures sur le plan économique, social et environnemental. Mais je ne me satisfais pas de ce bilan. Je suis conscient à la fois des difficultés qui continuent de peser sur la vie de nos concitoyens et du chemin qui nous reste à parcourir », dit-il, avant d’ajouter : « aujourd’hui, je voudrais que les réformes mises en œuvre passent à un niveau supérieur, et que les Gabonais en ressentent concrètement les effets dans leur vie quotidienne. La croissance, c’est bien. Mais la croissance, ça ne se mange pas ! »

Le président égraine ensuite l’ensemble des réformes qui ont jalonné ses dix ans au pouvoir, qu’elles soient économiques (emploi, formation, diversification, moindre dépendance aux matières premières, montée en gamme de certaines filières comme la sylviculture, industrialisation, réforme de l’Etat, rééquilibre des finances publiques…), sociales (réforme du système de santé, de l’assurance-maladie, de l’assurance-vieillesse, gratuité des soins pour l’accouchement, logement, accès aux services de base…), qu’elles concernent les infrastructures (« 75 % du réseau routier construit au Gabon depuis 40 ans l’a été ces dix dernières années », rappelle-t-il) ou l’environnement (un domaine dans lequel la diplomatie gabonaise est très en pointe).

Le bilan brossé, c’est vers l’avenir qu’entend désormais se projeter le président. « Durant les quatre prochaines années, le rythme des réformes sera accéléré », promet le chef de l’Etat, avertissant au passage que « ce qui compte, et tous les membres du gouvernement l’ont compris, ce ne sont pas les paroles et les effets d’annonce, ce sont les actions et les résultats ».

Et celui de prévenir : « Des erreurs ont été commises par le passé. Elles ne sauraient être renouvelées à l’avenir. Nous avons changé d’époque. La méthode n’est plus la même. L’ambition aussi a changé, confessant au passage qu’avec le temps, mon niveau d’exigence à l’égard des membres du gouvernement a augmenté alors que mon degré de patience, lui, a diminué. »

Invité à dévoiler son ambition pour l’avenir, le président Ali Bongo Ondimba répond sans ambages : « dans dix ans, le Gabon doit être dans les cinq pays moteurs en Afrique », clame-t-il, avant de détailler concrètement ce qu’il retourne : « atteindre l’objectif de plein emploi, donner la priorité à la formation, développer notre agriculture, davantage produire ce que nous consommons localement au lieu de l’importer, tirer davantage partie des richesses de notre sous-sol pour asseoir notre développement, consolider notre système de santé et de protection sociale et tirer pleinement profit de l’économie verte»

« J’irai jusqu’au bout de ma mission », lâche le président gabonais en conclusion de son interview, la première accordée à la presse depuis son AVC survenu le 24 octobre 2018 à Riyad en Arabie Saoudite. C’était il y a un an. Presqu’une éternité tant l’eau a coulé sous les ponts depuis. Cette page-là désormais est tournée. Une chose est sûre : il faudra compter avec lui dans les prochaines années.