Gabon : Pour l’opposant Frédéric Massavala, Jean Ping « enfume les Gabonais » et « pédale dans le vide »

De plus en plus isolé, l'opposant Jean Ping voit ses soutiens le quitter un à un © DR

A l’occasion d’une conférence de presse ce samedi 9 novembre à l’hôtel Triomphal de Libreville, Frédéric Massavala Maboumba a officialisé sa rupture avec Jean Ping dont « la stratégie de revendiquer la victoire lors de l’élection présidentielle de 2016 mène l’opposition droit dans le mur », a-t-il déclaré. Celui qui est toujours le porte-parole de la CNR n’a pas retenu ses coups.

C’est un phénomène bien connu, les coups les plus rudes sont souvent portés dans son propre camp. Hier, lors d’une conférence de presse, Frédéric Massavala Maboumba, le porte-parole de la Coalition pour la Nouvelle République, n’a pas eu de mots assez durs à l’encontre du président de cette formation d’opposition, Jean Ping (lire notre article).

Prenant explicitement ses distances avec le patron de la CNR, il a accusé l’ex-candidat unique de l’opposition d’« enfumer les Gabonais » , de « pédaler dans le vide » et d’emprisonner le débat politique dans l’élection présidentielle de 2016. Or, a-t-il assuré, « 2016 est très loin derrière nous, il est trop tard pour en parler, et 2023 est encore très loin, et il est trop tôt pour en parler. Il faut penser à maintenant », a-t-il martelé.

Enfonçant le clou, l’opposant a rappelé que « Jean Ping était le candidat de l’opposition en 2016. Or, nous sommes en 2019 et il continue de penser que nous allons arriver à son investiture à la suite de son élection présidentielle de 2016 (…) Permettez que je vous dise que je n’y crois plus », a confessé M. Massavala.

Déplorant le fait que « les hommes d’Etat sont éludés par les politiciens », Frédéric Massavala a mis en garde Jean Ping contre le fait de crier intempestivement au loup : « Si on continue à dire aux gens que ça arrivera bientôt alors que ça ne viendra jamais en réalité, on court le risque d’être discrédité à jamais ».

Contesté par les vieux barons comme les jeunes loups de l’opposition

Pour Jean Ping, en perte de vitesse sur le plan politique, sa rupture avec celui qu’il qualifiait il y a encore quelques mois de « prisonnier politique » est un nouveau coup dur. Contestée à la fois par les autres barons de l’opposition (Guy Nzouba-Ndama, Alexandre Barro-Chambrier, Zacharie Myboto…) et par les jeunes loups aux dents longues (Nicolas Nguema, Jean-Gaspard Ntoutoume Ayi, Mike Jocktane…), le leader de la Convention pour la Nouvelle République (CNR) n’apparaît plus comme le leader naturel de son camp dans la perspective de la prochaine élection présidentielle prévue en 2023.

Incapable de tirer partie de l’AVC d’Ali Bongo survenu le 24 octobre 2018, ses appels au soulèvement populaire sont restées lettres mortes. N’en démordant pas, il a alors tenté d’accréditer l’idée, à travers une communication savamment distillée, de la vacance du pouvoir présidentielle, soutenant qu’Ali Bongo Ondimba n’était plus capable de présider le Gabon et que le pouvoir était en réalité confisqué par son entourage. En s’en prenant à nouveau à lui, Jean Ping reconnait aujourd’hui implicitement que le chef de l’Etat est bel et bien aux commandes du pays.

Jean Ping a été pendant plusieurs décennies l’un des piliers du régime d’Omar Bongo avant de jouer, à la mort de ce dernier, sa propre carte, en revêtant les habits neufs de l’opposant qu’il n’a jamais été durant toute sa carrière. Arrivé deuxième de l’élection présidentielle de 2016, il continue, trois ans après, seul contre tous, à revendiquer sa victoire. Il aura 81 ans en 2023 lors de la prochaine élection présidentielle. Nombre de Gabonais ont une opinion mitigée à son sujet. Beaucoup le soupçonnent de s’être considérablement enrichi du temps où il était le directeur de cabinet d’Omar Bongo.