A Tchibanga dans la province de Nyanga, de lourds soupçons de connivence et de favoritisme pèsent sur la responsable locale du Centre gabonais des élections (CGE). Celle-ci serait proche de certains partis d’opposition, dont Les Démocrates de l’ancien président de l’assemblée nationale, Guy Nzouba Ndama.
A quelques jours du premier tour des élections législatives et locales au Gabon, prévus le 6 octobre, l’affaire jette une ombre sur certaines pratiques qui ont cours jusque dans les rangs de l’opposition gabonaise.
Tout est parti de l’agression cette semaine d’un employé de la société d’affichage GEC à Tchibanga. Chargé de coller des affiches pour le compte des candidats du Parti démocratique Gabonais (PDG), celui-ci est victime d’une agression verbale, très violente selon divers témoins, de la part des partisans du candidat Jean Pierre Doukaga Kassa. Les insultes pleuvent et les menaces de coups ne sont pas loin.
Apeuré, l’agent se précipite aussitôt en direction du poste de police où il est reçu par le commandant de gendarmerie qui ne tarde pas à prévenir… la présidente locale du CGE, Magalie Oye Makobia. Ce qui a de quoi surprendre.
Mais l’employé n’a pas encore tout vu. Au bout de quelques minutes, il se voit confisquer sans justification son matériel de travail. Pour justifier ce qui s’apparente à une voie de fait flagrante, la responsable du CGE à Tchibanga indique que c’est elle qui a le pouvoir de « répartir, selon son bon vouloir, les panneaux de la ville entre les différents candidats ». Une justification spécieuse car d’une part, la représentante du CGE n’a pas reçu un tel pouvoir ; d’autre part, les panneaux publicitaires recevant les affiches des différents candidats appartiennent à une régie privée et non à la mairie.
Manque de neutralité et favoritisme
Plusieurs candidats de diverses sensibilités avaient déjà donné l’alerte sur l’attitude pour le moins singulière de cette responsable du CGE à Tchibanga. « Son manque de neutralité a souvent été dénoncé, sans qu’il n’y ait eu de sanction jusqu’à présent », regrette l’un de ces candidats qui se présente aux locales dans la circonscription.
Il faut dire que Magalie Oye Makobia n’avait peut être pas le profil de la fonction. Proche de Guy Nzouba Ndama, elle n’a pas hésité à de nombreuses reprises à favoriser certains partis d’opposition, en particulier Les Démocrates, parti dont le leader n’est autre que l’ancien président de l’assemblée nationale. « C’est Guy Nzouba Ndama qui tire les ficelles en sous main », accuse un autre candidat aux élections législatives.
Pas une surprise au Gabon
Cette affaire, pour autant, n’est en rien une surprise au Gabon. « A l’extérieur du pays, les gens pensent qu’il n’y aurait que le pouvoir qui tenterait de tricher ou de mal se comporter. Cela nous fait toujours un peu sourire. Car chacun sait ici ce qu’il en est », dit ce professeur de science politique de l’UOB.
« Les médias occidentaux, français notamment, ne peuvent pas comprendre. Ils ont une vue manichéenne des choses et une grille de lecture simpliste et inadaptée à la situation gabonaise. Pour eux, ce genre d’affaire est impensable car cela ne correspond pas à leur vision binaire : les bons du côté de l’opposition, les méchants du côté du pouvoir. Mais la réalité, comme toujours, est autrement plus complexe », glisse-t-il dans un sourire teinté d’ironie.