Gabon : L’ex-ministre et opposant Patrick Eyogo Edzang retourne dans la majorité

L'ancien ministre Patrick Eyogo Edzang écoutant le discours de Brice Laccruche Alihanga vendredi 6 septembre © DR

La présence hier de l’ex-ministre de l’Eau et de l’Energie lors du discours de Brice Laccruche Alihanga au Stade omnisports d’Oyem dans le Woleu-Ntem a été particulièrement remarquée. Elle illustre le phénomène plus large de réintégration ou de maintien dans la majorité d’importantes figures de la vie politique gabonaise, favorisé par le retour aux affaires fin mars dernier d’Ali Bongo Ondimba. 

Vendredi 6 septembre, Brice Laccruche Alihanga, le directeur de cabinet politique du président Ali Bongo Ondimba, ponctuait sa tournée d’une semaine en province (il s’est successivement rendu dans la Nyanga, le Moyen-Ogooué et le Woleu-Ntem) par un discours au Palais d’omnisports d’Oyem, chef-lieu du Woleu-Ntem, province du nord du pays (lire notre article).

A cette occasion, Brice Laccruche Alihanga était accompagné de plusieurs ministres (Roger Owono Mba à l’Economie, Tony Ondo Mba aux Mines et à l’Energie, Franck Nguema au Sport et à la Culture, etc.).

Mais parmi l’auditoire, une personne, bien que discrète, s’est particulièrement fait remarquer : Patrick Eyogo Edzang. Après son départ du gouvernement en janvier dernier, l’ex-ministre de l’Eau et de l’Energie, avait semblé vouloir se rapprocher de sa famille politique d’origine, l’opposition. Hier, sa présence au Palais omnisports d’Oyem, envoyait un signal sans équivoque. Patrick Eyogo Edzang est de retour au sein de la majorité.

Un mouvement loin d’être isolé. Ces dernières semaines, nombre de figures de la vie politique gabonaise que l’on disait susceptibles de rejoindre l’opposition avec armes et bagages, ont finalement renoncé à franchir le Rubicon. C’est le cas notamment de l’ex-premier ministre Emmanuel Issozé Ngondet (lire notre article).

D’autres, qui s’en étaient éloignés, ont fait le choix de retourner la majorité. C’est le cas en particulier de l’ancien ministre du Pétrole, Etienne Dieudonné Ngoubou. Interpellé pour détournement présumé de fonds publics, mis en détention à la prison centrale de Libreville dans le cadre de l’opération Mamba, il a été libéré près de deux ans après son arrestation. En début de semaine, celui-ci a ostensiblement accompagné Brice Laccruche Alihanga tout au long de son séjour dans la Nyanga. Un signe tangible que la hache de guerre est définitivement enterrée entre Ngoubou et la majorité.

Brice Laccruche Alihanga et Etienne Ngoubou dans la Nyanga, le 2 septembre 2019 © DR

Pourquoi un tel mouvement qui a eu tendance à s’accentuer ces dernières semaines ? Pour ce professeur en science politique de l’UOB, le retour en forme du président Ali Bongo Ondimba ces derniers mois n’y est pas étranger.

« Plusieurs figures de la vie politique gabonaise ont cru que le président ne reviendrait pas. Finalement, avec son retour définitif, ceux qui étaient susceptibles de rejoindre l’opposition ou de jouer leur propre carte y ont renoncé », explique ce politologue.

« Le PDG, qui détient une très large majorité au Parlement, est archi-dominant. L’opposition, elle, est morcelée et affaiblie. Elle ne représente pas une alternative crédible aux yeux des Gabonais. Son discours est systématiquement critique et se concentre sur des sujets politiciens. Elle a du mal a formuler des idées sur les sujets qui préoccupent au quotidien les Gabonais », ajoute ce professeur. « C’est en partie ce qui explique son très mauvais score lors des dernières élections générales en octobre dernier », précise-t-il.

Sans doute, la tournée de Brice Laccruche Alihanga en province cette semaine n’avait-elle pas pour unique vocation de délivrer la parole du chef de l’Etat. Il s’agissait également de « ramener au bercail les brebis égarées », comme le dit avec ses mots un responsable du PDG. De ce point de vue, sa mission a été parfaitement réussie.