Gabon : « L’arrestation du puissant homme d’affaires Alexis Ndouna, accusé de viol sur mineur, illustre la volonté de fermeté de la Justice et la fin d’une certaine impunité des puissants »

L'homme d'affaires Alexis Ndouna menotté sur le tarmac de l'aéroport de Libreville ce samedi 28 décembre © DR

Poursuivi au Gabon pour viol sur mineur, le puissant homme d’affaires Alexis Ndouna a été interpellé à Brazzaville au Congo et extradé ce samedi à Libreville, suite à l’émission par cette dernière d’un mandat d’arrêt international. Une nouvelle illustration de la volonté de fermeté des autorités gabonaises à l’égard des proches du pouvoir, quelques semaines seulement après le lancement d’une vaste opération anti-corruption. 

« C’est le meilleur cadeau de fin d’année pour nous », a commenté une tante de Wally, criant « alleluia » après avoir appris l’arrivée sur le territoire national d’Alexis Ndouna. Les mains liées en avant par des menottes, la photo d’Alexis Ndouna sur le tarmac de l’aéroport international Léon Mba de Libreville circule abondement sur les réseaux sociaux.

En octobre dernier, ce riche homme d’affaires proche du pouvoir, avait suscité un vaste émoi dans l’opinion. Il avait été accusé d’avoir violé la petite Wally âgée d’à peine 14 ans et de se faire livrer des mineurs contre de l’argent et des cadeaux. Une pratique connue au Gabon sous le nom de « code placement ».

Des associations féministes avaient alors organisé des marchés en direction du palais de justice. Mais Alexis Ndouna avait déjà discrètement quitté le Gabon pour le Congo Brazzaville.

A l’époque, l’attitude des autorités gabonaises, très critiquées pour avoir pris cette sordide affaire avec une forme de légèreté, avait tranché avec l’émoi que celle-ci avait suscité dans l’opinion. « Le gouvernement Nkoghe Bekalé n’avait pris la mesure de la situation qu’avec l’indignation spectaculaire des populations gabonaises via les réseaux sociaux. Cette prise de mesure s’était d’ailleurs soldée par une timide déclaration sur Twitter des ministres de la justice et de la condition féminin», rappelle le site d’information Médias 241 qui a, le premier, annoncé hier l’arrestation de l’homme d’affaires à Brazzaville.

Après plusieurs jours, Libreville avait tout de même fini par saisir Interpol. Deux mois après, Alexis Ndouna a été extradé au Gabon pour répondre de ses actes.

Nouvelle politique pénale et tolérance zéro

Entre temps, les autorités gabonaises ont fait de cette affaire une priorité. Fin novembre, une partie des services de police et de sécurité a été remaniée et une nouvelle politique pénale définie. Libreville souhaite rompre avec une forme d’impunité qui a longtemps prévalu au sommet de l’Etat pour les proches du pouvoir, qu’il s’agisse d’affaires de mœurs (viol sur mineur, crimes rituels…) ou de corruption et d’enrichissement illicite (affaire Scorpion en cours). Ce que confirme un magistrat proche du dossier. « Cette arrestation illustre la volonté de fermeté de la Justice gabonaise et la fin d’une certaine impunité pour les crimes commis par les puissants », se réjouit celui-ci.

Le volontarisme affiché par les autorités gabonaises dans le cadre de l’affaire Wally bat en brèche l’argument d’une partie de l’opposition qui avait tenté ces dernières semaines de créer une polémique en évoquant une justice sélective, sévères avec les uns (les ex-responsables publics placés sous mandat de dépôt dans le cadre de l’opération anti-corruption), laxistes avec les autres (Alexis Ndouna notamment).

Il y a quelques semaines, le président Ali Bongo Ondimba avait prévenu : « Personne au Gabon, quel qu’il soit, n’est au dessus des lois» Il s’agit, indéniablement, d’un véritable tournant.