Gabon : « Jean Ping est artificiellement maintenu en vie politique par quelques médias et une poignée d’activistes sur les réseaux sociaux » (politologue)

Jean Ping, l'ex-leader de l'opposition gabonaise © DR

« La cérémonie de présentation des voeux au Président de la République élu, Jean Ping, aura lieu le mardi 14 janvier 2020 dans les jardins de la résidence (de son QG du quartier des Charbonnages) », annonce un communiqué de son mouvement, la Coalition pour la nouvelle République (CNR).

Après avoir présenté ses « voeux à la Nation » le 31 décembre, Jean Ping tente de singer le chef de l’Etat Ali Bongo, auquel les forces de défense et de sécurité (le 28 décembre), le corps diplomatique (le 6 janvier) et les corps constitués (le 7 janvier) ont présenté leurs vœux.

« La cérémonie de présentation des voeux au Président de la République élu, Jean Ping, aura lieu le mardi 14 janvier 2020 », indique un communiqué de la CNR diffusé mercredi

Si le patron de la CNR tentera d’y faire bonne figure, le moral de ses troupes est au plus bas. « Le sommet de la CEEAC en décembre dernier (qui a vu Ali Bongo faire son grand retour sur la scène internationale, NDLR) lui a porté un coup au moral », concède l’un de ses plus fidèles lieutenants, « tout comme l’annonce de la normalisation des relations entre le Gabon et l’Union européenne (en décembre dernier également, NDLR) ».

Snobé par Jean-Baptiste Lemoyne en visite au Gabon ce jeudi

Un coup dur pour Jean Ping. Ces deux dernières années, le Parlement de l’UE a été son seul potentiel soutien à l’extérieur. Un soutien sur lequel l’ex-candidat unique de l’opposition ne peut désormais plus compter dans son combat pour « la vérité des urnes ». Pas plus que sur celui de la France qui a décidé, depuis l’élection d’Emmanuel Macron à la présidence de la République, de remettre à plat ses relations avec le Gabon, exécrables sous le mandat de François Hollande (2012-2017). En visite à Libreville ce jeudi, le secrétaire d’Etat français aux Affaires étrangères, Jean-Baptiste Lemoyne a fait le choix de snober l’ex-candidat unique de l’opposition, malgré les demandes pressantes dont il a été l’objet du côté de M. Ping.

Sans soutien extérieur, Jean Ping est également très affaibli dans son propre camp politique. Considéré comme dépassé par la jeune garde (notamment le collectif Appel à Agir), il est de plus en plus ouvertement critiqué par les vieux barons de l’opposition, à l’instar de Guy Nzouba-Ndama, le président des Démocrates, premier parti d’opposition à l’Assemblée nationale avec dix députés, avec lequel les relations sont désormais à couteaux tirés.

Confronté à l’hémorragie de ses soutiens de 2016, Ping a ces derniers temps durci son discours. Au point parfois de déraper, comme en septembre et octobre derniers où il a tenu des propos ouvertement xénophobes ou encore début décembre lorsqu’il s’en est pris de façon virulente et avec misogynie à Sylvia Bongo Ondimba.

Pour ce professeur en science politique de l’UOB, l’attitude de Jean Ping n’est nullement surprenante. « C’est un grand classique. Quand vous êtes marginalisé, vous êtes contraint à vous radicaliser pour continuer d’exister », explique l’universitaire qui juge impossible une nouvelle candidature de Jean Ping à l’élection présidentielle en tant que chef de fil de l’opposition. Aujourd’hui, M. Ping « est artificiellement maintenu en vie politique par quelques médias et une poignée d’activistes sur les réseaux sociaux mais la roue semble, pour lui avoir définitivement tournée », conclut-il, tranchant.

Jean Ping, qui aura 81 ans en 2023 lors de la prochaine présidentielle, et son clan en ont-ils pris conscience ? Possible. Désormais, c’est son propre fils, Franck Ping, qui brigue sa succession en vue du leadership au sein de l’opposition dans les années à venir (lire notre article). Au Gabon, une page de l’histoire politique récente du pays pourrait fort bien prochainement se refermer.