Gabon : Au tour de France Info de tomber dans le panneau

Marc Ona Essangui, coqueluche des médias internationaux sur le Gabon © DR

La rédaction Afrique de la radio française a consacré un long article ce samedi 28 décembre sur ce qu’elle appelle « la polémique sur la vacance du pouvoir présidentiel » dont le contenu est largement inspiré par l’activiste Marc Ona Essangui, coqueluche des médias français mais à l’audience très limitée au Gabon. 

« Les mêmes causes produisent les mêmes conséquences », sourit, avec le calme des vieilles troupes, une des meilleures plumes de L’Union, le grand quotidien institutionnel gabonais. « Quand on est journaliste et qu’on ne connait pas le Gabon, on se raccroche à n’importe quelle branche (…) Aujourd’hui, on va sur Twitter. Et là, c’est la prime à qui parle le plus fort et avec le moins de nuance », explique-t-il. « A ce moment-là, vous tombez assez rapidement sur Marc Ona », ajoute-t-il.

Ce samedi, c’était au tour de France Info d’offrir son quart d’heure de gloire warholien à l’activiste 2.0. Ses propos irradient un long article consacré à ce que le journaliste Martin Mateso qualifie de « polémique sur la vacance du pouvoir présidentiel » au Gabon.

Une « polémique » largement datée et désormais purement virtuelle

Une « polémique » largement datée (Ali Bongo Ondimba a ces derniers mois repris fermement en main les commandes du pays et fait son grand retour sur la scène internationale) et désormais purement virtuelle qui se limite, pour l’essentiel, à une poignée d’activistes sur les réseaux sociaux.

Mais « il n’en faut pas plus pour convaincre les médias internationaux, français dans leur écrasante majorité, de traiter le sujet car, d’une part ils se vivent contre un contre-pouvoir, d’autre part ils ont par nature une vision romantique de l’opposition, bonne par nature, face à un pouvoir, oppresseur par essence », décrypte un ex-journaliste de l’AFP qui en poste à Libreville ces dernières années avant de rejoindre l’Afrique de l’Ouest. « Un tel papier de leur part sur Cuba ou le Venezuela serait impossible car ça ne correspond pas à leur logiciel idéologique », ajoute-t-il.

Membre du collectif Appel à agir, Marc Ona Essangui est devenu ces dernières années la coqueluche des médias internationaux. RFI, BBC, Deutsche Welle…  l’activiste est ce que l’on appelle un « bon client » dans le jargon médiatique. Mais à l’international seulement. « Au Gabon, il ne représente politiquement pas grand chose, c’est pourquoi il est très peu sollicité », explique le journaliste de L’Union.

Son ONG, The Brainforest, une coquille vide, disent ses détracteurs

« Il est davantage connu ici pour relayer des fake news sur les réseaux sociaux », raille, de son côté, un des lieutenants de Guy Nzouba-Ndama, le président des Démocrates, premier parti d’opposition représenté à l’Assemblée nationale. Le 19 décembre dernier, au lendemain du sommet extraordinaire de la CEEAC à Libreville, Marc Ona Essangui avait sciemment minoré le nombre de chefs d’Etat présents à l’occasion afin de tenter d’atténuer le succès diplomatique d’un tel événement pour le président gabonais, Ali Bongo Ondimba (voir son tweet).

D’autres pointent du doigt son ONG, The Brainforest. Une coquille vide qui servirait à Marc Ona de strapontin médiatique. « Il est facile de vérifier qu’il s’agit d’un coquille vide », commente ce responsable d’une ONG international spécialisée dans la défense des éléphants, très active dans le pays. « Il y a quelques années, j’ai tenté de travaillé avec Marc Ona et The Brainforest mais je me suis rendu compte que derrière la façade, il n’y avait pas grand chose », glisse-t-il.

Ici, la stratégie, parfaitement rodée, du collectif Appel à agir est bien connue et ne leurre plus personne. Il s’agit de créer une polémique sur les réseaux sociaux, puis d’inonder les médias internationaux de communiqués et finalement de les appeler afin de décrocher des interviews. Cela s’appelle faire du push.

Confusion entre visibilité médiatique et représentativité politique

Une stratégie classique selon ce professeur en science politique de l’UOB. « Les journalistes qui ne sont pas ici au Gabon confondent facilement visibilité médiatique et représentativité politique (…) Or, Appel à agir a parfaitement compris la manière dont les médias internationaux fonctionnent. C’est pourquoi il mise tout sur la visibilité médiatique en cherchant à faire le buzz. Sur le terrain, ça n’a aucun impact, mais on fait parler de soi », analyse l’universitaire qui ajoute que le collectif bénéficie aussi de la faiblesse actuelle de l’opposition, ce qui rétrécie le vivier d’interlocuteurs potentiels.

Pour rappel, lors des élections générales d’octobre 2018 qui se sont présentés ont tous été balayés dès le premier tour. C’est le cas en particulier de Jean-Gaspard Ntoutoume Ayi et de Nicolas Nguema.