Gabon : après la conférence de presse de Barro Chambrier, Ping dénonce une « tentative de division de l’opposition »

Le leadership de Jean Ping est désormais ouvertement contesté par Alexandre Barro Chambrier et les autres leaders de l'opposition au Gabon @ DR

C’est peu de dire que le leader de la Coalition pour la Nouvelle République a mal pris les propos du président du Rassemblement Héritage et Modernité (RHM) lors de sa conférence de presse vendredi. Entre les deux opposants, la hache de guerre est déterrée et la course au leadership de l’opposition relancée.

Après qu’on lui ait rapporté les propos du président du RHM lors de sa conférence de presse, Jean Ping a fulminé, ont rapporté plusieurs de ses proches. « C’est une tentative de division de notre camp. Appeler au rassemblement de l’opposition tout en excluant sa principale composante, où est la logique ? », a dénoncé Jean Ping auprès son entourage.

C’est pourtant dans la posture du rassembleur de l’opposition qu’Alexandre Barro Chambrier s’est présenté ce vendredi à sa conférence de presse. La plupart des principaux leaders de l’opposition, absents lors de l’ « appel au rassemblement » de Jean Ping le 4 novembre dernier, étaient cette fois-ci tous présents : de Guy Nzouba Ndama à Zacharie Myboto, en passant par Casimir Oye Mba, Nicolas Nguema, Richard Moulomba ou encore les membres du cercle des sages de la République Paul Malekou et Eugene Kakou Mayaza, etc.

Barro Chambrier n’a à aucun moment cité le nom de Jean Ping

Alors qu’Alexandre Barro Chambrier a cité à plusieurs reprises le nom de ces figures de l’opposition en appelant explicitement au rassemblement de son camp, celui de Jean Ping n’a, à aucun moment, été mentionné dans son propos liminaire. Il aura fallu attendre la fin de la conférence et une question d’un journaliste pour que le président du RHM cite, de manière improvisée, le nom du leader de la CNR, rappelant son statut de candidat commun de l’opposition lors du scrutin de 2016. Une manière à peine subliminale de le caricaturer en homme du passé.

Divergence de stratégie

Sur le fond, Ping et Barro Chambrier s’opposent également sur la stratégie à suivre alors qu’Ali Bongo Ondimba est en convalescence au Maroc. En appeler à la rue, propose le premier ? Non, rétorque le second, qui soutient « l’idée émise par Guy Nzouba Ndama, Zacharie Myboto et Anges Kevin Nzigou de l’envoi à Rabat d’une équipe médicale gabonaise constituée sur une base consensuelle, pour aller constater la capacité d’Ali Bongo Ondimba à poursuivre l’accomplissement des lourdes charges qu’il s’est octroyées ». Une idée sèchement écartée par Jean Ping qui privilégie une action plus radicale, extra-institutionnelle.

Hache de guerre déterrée et course au leadership relancée au sein de l’opposition

Pour ce professeur en science politique de l’Université Omar Bongo (UOB), l’intervention du président du RHM est clairement à resituer dans la course pour le leadership de l’opposition. « Alexandre Barro Chambrier aujourd’hui s’est positionné en futur leader de l’opposition. D’ailleurs, le timing de son intervention n’est pas anodin. Il a attendu que Jean Ping déroule sa stratégie en espérant que celle-ci échoue. Ce qui a été le cas car l’appel au rassemblement du leader de la CNR n’a pas rencontré l’écho escompté, de même que les appels à la mobilisation qu’il a multiplié ces dernières semaines. Son meeting du 15 décembre a, lui, été marqué par une faible mobilisation et, derrière, les syndicats sur lesquels il comptait s’appuyer, à l’instar de Dynamique Unitaire, ne sont pas parvenus à mettre leurs militants dans la rue », explique cet universitaire. « Le président du RHM a patiemment attendu. Aujourd’hui, il sort du bois car il sait que son rival est en position de faiblesse », ajoute-t-il.

Ce vendredi 15 décembre, c’est moins à une charge contre Ali Bongo et son régime qu’Alexandre Barro Chambrier s’est livré, qu’un coup de grâce qu’il a tenté d’asséner à son rival affaibli, Jean Ping. Mais, préviennent les proches du leader de la CNR, celui-ci ne se laissera pas faire. Entre les deux opposants, la hache de guerre est bel et bien déterrée et la course au leadership de l’opposition défintivement relancée.