[Fake news] Gabon : Non, Frédéric Bongo n’est pas interdit d’accès au Palais présidentiel

Le lieutenant-colonel Frédéric Bongo, patron des services de renseignements de la Garde républicaine (GR) @ DR

Pas plus d’ailleurs qu’il serait question de le faire renvoyer de son poste de patron des services de renseignements de la Garde républicaine. Pourtant, ces affirmations circulent depuis 48 heures sur les réseaux sociaux. De leurs côtés, certains médias n’hésitent pas à en faire leur choux gras. 

C’est une note de service interne à la Garde républicaine (non encore officiellement authentifiée par la présidence) qui a mis le feu au poudre. Datée du lundi 25 février, elle comporte 17 noms de personnes qui désormais n’ont plus accès à la Palmeraie, villa Noura, villa Nam, Ossa Lodge, CEMAC et Bureau SCP-YSSIA, autrement dit les appartements privés du président et de la première dame, Ali et Sylvia Bongo Ondimba (lire notre article à ce sujet).

Il n’en fallait pas moins pour enflammer les réseaux sociaux et faire s’emballer certains médias (lire en particulier l’article paru sur le site internet de La Lettre du Continent vendredi 1er mars sous le titre « Sylvia Bongo frappe d’oukaze 18 conseillers présidentiels »).

Rapidement, cette note fait l’objet d’une instrumentalisation. Alors qu’elle comporte dix-sept noms seuls trois sont excipés : ceux de Steed Rey (l’ex-responsable du protocole, muté comme simple conseiller du directeur général de l’ANPI), de Park Sang-Chul (l’ex-intendant personnel du chef de l’Etat admis à faire valoir cette semaine ses droits à la retraite) et de Frédéric Bongo (le patron des services de renseignements de la GR).

Pourquoi seuls ces trois noms sur 17 ? Manifestement, il s’agit de présenter le contenu de cette note (encore une fois, dont on ne sait à cette heure si elle est authentique) comme la preuve formelle d’une sanction visant ces trois personnes en particulier. La thèse implicite est simple : ces trois personnalités, présumées être – à tort ou à raison – en disgrâce – depuis plusieurs semaines, seraient, c’est selon, victimes d’un « acharnement », d’une « purge » ou d’une « chasse aux sorcières ».

Quoi qu’il en soit, cette décision de limiter certains accès au sein de la présidence, croit savoir La Lettre du Continent, aurait été prise lors d’une réunion organisée juste avant le conseil des ministres du 26 février dernier. Selon cette lettre, cette réunion aurait été « convoquée par la première dame, Sylvia Bongo Ondimba, avec l’ensemble de ses collaborateurs dans le bureau du directeur de cabinet du chef de l’Etat, Brice Laccruche Alihanga ». Problème : une telle réunion n’a jamais eu lieu, a fortiori à l’endroit indiqué. Plusieurs sources directes nous l’ont confirmés. Il aurait été facile, par recoupement, de le vérifier.

Sur les trois noms cités, l’un en particulier focalise toute l’attention. Celui du patron des services de renseignements de la Garde républicaine, le lieutenant-colonel Frédéric Bongo. Dans son article, La Lettre du Continent sous-entend que la première dame, Sylvia Bongo, voire le directeur de cabinet du président, Brice Laccruche Alihanga, chercheraient à obtenir son « scalp ».

« Quelle imagination ! C’est totalement ridicule », s’amuse un membre éminent du gouvernement qui ne voit là nullement matière à polémiquer. « Ecrire ou, à tout le moins, insinuer à travers une formulation ambiguë que Frédéric Bongo n’aurait plus accès au Palais du Bord de mer, siège de la présidence de la République », est tout simplement faux », affirme-t-il. « L’affaire est très simple. La note qui circule, dont je ne sais si elle est authentique, mais partons du principe qu’elle l’est, concerne l’accès aux appartements privés du couple présidentiel et non à la partie publique du Palais du Bord de mer. La première dame a donc parfaitement le droit de dire qui elle souhaite voir ou pas chez elle. Cela se passe comme ça partout dans le monde, en France, aux Etats-Unis, partout », soutient ce poids lourd du gouvernement. « Vous n’avez qu’à demander à Brigitte Macron ou Mélania Trump ! », ajoute-t-il dans un éclat de rire.

Une source au sein de la présidence nous explique, elle, pourquoi il est nécessaire de limiter l’accès aux appartements privés du couple présidentiel. « Le président a eu de graves problèmes de santé. Grâce à Dieu, il est aujourd’hui presque totalement remis. Mais il lui faut du repos. C’est la préoccupation prioritaire de la première dame. Faire en sorte que son président de mari puisse se reposer. Voilà pourquoi il a été décidé dans ces circonstances particulières de limiter l’accès aux appartements privés du président et de la première dame aux personnels strictement nécessaires », explique cette source haut placée. « Y voir une chasse aux sorcières, c’est soit un manque de discernement, soit de la malveillance », souligne-t-elle.

Celle-ci dit ne pas être en mesure d’authentifier la note qui circule ces deux derniers jours sur les réseaux sociaux. En revanche, elle qualifie « d’élucubrations » les affirmations selon lesquelles la première dame chercherait à démettre de ses fonctions de patron des services de renseignements de la GR Frédéric Bongo. « C’est grotesque », dit-elle. « Tout comme l’étaient les affirmations précédentes selon lesquelles le directeur de cabinet du président (Brice Laccruche Alihanga) aurait lui aussi cherché, voire chercherait encore, à avoir la peau de Frédéric Bongo. Nous ne sommes pas dans la série House of cards ! », ironise notre source.

« Certes », concède-t-elle, « entre Brice Laccruche Alihanga et Frédéric Bongo, il y a eu des tensions en novembre et décembre. Ce serait mentir que de le nier. Mais la situation était alors très compliquée. Depuis », assure-t-elle, « les relations entre les deux hommes sont revenues à la normale. Elles sont aujourd’hui quasi-quotidiennes et le dialogue entre eux est très fluide. Le reste, c’est désormais de l’histoire ancienne », conclut notre interlocuteur.