Face aux manœuvres de Félix Tshisekedi pour lui ravir irrégulièrement un siège de membre non permanent au Conseil de sécurité de l’ONU, le Gabon monte au créneau

Le conseil de sécurité de l'ONU siégeant à New York © DR

Alors que le Gabon a officiellement été désigné en février dernier aux côtés du Ghana candidat au nom de l’Union Africaine pour le poste de membre non permanent du Conseil de sécurité pour la période 2022-2023, Félix Tshisekedi semble profiter de sa position de président en exercice de l’UA pour tenter de lui ravir la place. Il a dépêché à Washington une délégation afin de plaider sa cause. Mais Libreville ne s’en laisse pas compter et organise la riposte. 

Branle-bas de combat à Libreville.

Alors que l’Union africaine soutient officiellement la candidature du Gabon, son président en exercice, Félix Tshisekedi, tente d’imposer aux forceps la candidature de son pays, la RDC. Quitte à prendre des libertés, beaucoup de liberté, avec les textes de l’organisation dont il détient les rênes pour quelque temps encore.

L’enjeu pour le président RD congolais est essentiellement d’ordre intérieur : titulaire d’un très mauvais bilan depuis son accession au pouvoir en janvier 2019 dans des circonstances éminemment controversées, celui-ci devra se représenter devant les électeurs en 2023. Or, il ne peut raisonnablement espérer l’emporter à la régulière. D’où l’intérêt pour lui d’un siège de membre non permanent du Conseil de sécurité à ce moment-là afin de prévenir d’éventuelles sanctions de la part de la communauté internationale.

C’est pourquoi il y met les moyens. Selon Jeune Afrique, « une équipe de hauts fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères et de la présidence se trouve déjà à New York pour mener campagne. Cette mission de lobbying doit être rejointe en fin de semaine par Atoki Ileka, directeur de cabinet du ministre des Affaires étrangères et ancien ambassadeur de RDC en France et aux Nations unies, puis, en début de semaine prochaine, par le nouveau ministre des Affaires étrangères Christophe Lutundula. »

Le président de l’UA viole les propres textes de l’UA

Face à ce qu’il considère comme des « manœuvres », le Gabon, qui dispose en l’espèce du soutien de la quasi-totalité des pays africains, rappelle qu’il est dans son bon droit au regard des règles qui régissent le fonctionnement de l’Union africaine. « La candidature du Gabon a été valablement déposée et dans les délais, contrairement à celle de la RDC. Ensuite, elle a été officiellement validée par l’UA lor d’un Comité début février », rappelle une source gabonaise qui trouve « un peu fort que le président de l’UA viole les propres textes de l’UA ».

Dans une série de tweets diffusées ce matin, l’ambassadeur du Gabon auprès de l’UA, Hermann Immongault, ne dit pas autre chose. « L’UA fait désormais le choix strict du respect de ses textes. (La candidature de la RDC est une) remise en question de sa gouvernance et de son leadership (…) Ce n’est ‘L’ Afrique que nous voulons’. Le Gabon, lui, joue sa partition. En toute légalité. En toute légitimité », a réagi le diplomate soulignant que son pays était dans son bon droit.

Celui-ci insiste par ailleurs sur le fait que si Libreville avait été choisi à l’époque, c’est pour des raisons objectifs en regard de la solidité de son dossier. « Le Gabon est très présent sur les dossiers de l’environnement, de la lutte contre le terrorisme et plus généralement de la sécurité », rappelle M. Immongault. « On ne peut en dire autant de la RDC, surtout en regard de ce qui se passe à l’est du pays où la situation en fait qu’empirer », constate un ambassadeur sud-africain. « Raison pour laquelle la candidature de Libreville avait nettement été préférée à celle de Kinshasa », remémore-t-il.

Piètre image de l’Afrique

Face aux velléités RD congolaises, Libreville ne se contente pas de protester. Elle agit. A la fois à Addis Abeba et à New York où est attendu dans les prochaines heures le ministre gabonais des Affaires, Pacôme Moubelet. Par ailleurs, Michaël Moussa, l’actuel ministre de la Défense, qui fut durant les dix dernières années ambassadeur du Gabon à Washington, s’active dans la coulisse. « On ne se laissera pas impunément marcher sur les pieds », averti une source au sein de la diplomatie gabonaise, ajoutant que « le crocodile gabonais a la peau dure ».

En attendant, le spectacle donné par l’Afrique fait très mauvais genre. « Convenez que le fait que le président d’une organisation qui viole les textes de cette organisation pour son propre intérêt, cela fait pour le moins désordre », commente passablement excédée une des membres du cabinet du sous-secrétaire d’Etat américain aux Affaires africaines.

A l’évidence, c’est une bien piètre image de l’Afrique qu’offre aux yeux du monde le président Félix Tshisekedi.