Elections au Gabon : l’AFP tente de minimiser la victoire du PDG

Ce samedi 6 octobre, des élections législatives et locales ont eu lieu au Gabon, largement remportées par le parti au pouvoir © Live Elections Gabon – Facebook

Samedi 6 octobre, lors des élections locales et du premier tour des législatives au Gabon, le parti au pouvoir l’a largement emporté. Pour l’opposition, l’ampleur de la défaite est telle que celle-ci n’a même pas pris la peine, comme à l’accoutumée, de crier à la fraude. Seule l’AFP, de manière très isolée, rappor des éléments censés attester du fait que les scrutins ne se seraient pas totalement déroulées à la régulière.  

Elle s’attendait à une défaite mais sans doute pas avec un tel écart. Lors des élections locales et législatives (1er tour) qui se sont déroulées samedi 6 octobre au Gabon, l’opposition a subi une lourde déconvenue. Certaines de ses principales figures ont subi une cuisante défaite dès le premier tour des législatives, comme ce fut le cas de Jean Gaspard Ntoutoume Ayi, Paul Marie Gondjout (tous deux membres de l’Union Nationale) ou encore Guy Nzouba Ndama (Les Démocrates). D’autres ont été forcés à un second tour, à l’instar d’Alexandre Barro Chambrier, le président du Rassemblement Héritage et Modernité, pressenti pour devenir le nouveau leader de l’opposition.

Si le taux de participation lors de ces scrutins a été relativement faible, les opérations de vote se sont parfaitement déroulées dans l’ensemble, sans incident notable. C’est ce que devraient probablement dire les observateurs de l’Union Africaine lors d’une conférence de presse prévue aujourd’hui.

Seule voie dissonante, celle de l’AFP

Faute d’éléments négatifs à se mettre sous la dent, la presse internationale s’est contenté d’une couverture factuelle du scrutin, relevant un taux de participation faible et la victoire du camp présidentiel. C’est le cas notamment des médias anglo-saxons, ainsi que ceux des pays émergents (Chine, Russie, Inde, Turquie…) qui ont, pour certains d’entre eux pour la première fois, couvert le scrutin.

Il n’y a guère que quelques médias français à voir le verre à moitié vide. En l’occurrence ceux alimentés par l’Agence Française de Presse. L’AFP qui, dans ses dépêches, s’est employée à minimiser le score du parti au pouvoir. Citant abondamment Jean Ping – dont elle semble avoir une vision romantique – en omettant de mentionner les autres leaders de l’opposition (Alexandre Barro Chambrier, Zacharie Myboto, Jean Gaspard Ntoutoume Ayi…) qui ont très majoritairement rejeté l’appel au boycott de ces élections d’octobre lancé par le leader de la Coalition pour la Nouvelle République, l’Agence Française de Presse soutient que « de nombreux Gabonais ont déclaré à l’AFP ne pas se rendre aux urnes, en raison notamment de la fraude électorale et du souvenir des violences qui avaient marqué la présidentielle de 2016. »

Véritable réquisitoire

Celle-ci ajoute en outre que « samedi soir, lors du début du dépouillement des bulletins à l’école Martine Oulabou, à Libreville, un militaire a dit à une journaliste de l’AFP avoir été payé « 20.000 francs CFA » (30 euros) pour voter en faveur du candidat du PDG. » Et l’AFP d’ajouter pour parachever ce qui peut s’apparenter à un véritable réquisitoire : « des sapeurs-pompiers sont arrivés en masse » dans l’après-midi, « ils avaient été payés pour voter pour le parti au pouvoir », avait affirmé samedi à l’AFP, Flora Mamboma, assistante de direction de 42 ans. » Des allégations impossibles à vérifier. Seul élément concédé au final par l’AFP : le fait qu’ « aucune violence n’a été constatée lors de ces élections ».

Vision romantique de Jean Ping

Pour ce professeur en science de la communication de l’UOB, le traitement médiatique réservé à ces scrutins par l’Agence Française de Presse est tout sauf une surprise. « Au Gabon, l’AFP a tendance a égratigner le pouvoir. Elle a une approche journalistique moins objective que partisane. Depuis 2016, elle a pris fait et cause pour Jean Ping, dont elle a une vision romantique, ce qui l’empêche d’analyser finement la recomposition à l’oeuvre dans ce camp-là où M. Ping n’est plus le leader naturel qu’il a été deux ans plus tôt », explique l’universitaire.

Et celui-ci d’ajouter : « vous savez, la pente naturelle des médias est de parler des trains qui n’arrivent pas à l’heure. Pour rester dans cette grille de lecture, ils ont une technique bien rodée : citer une anecdote censée expliquer une situation dans son ensemble. Cela part d’un bon sentiment : faire de la pédagogie par l’exemple. Mais ce faisant, on confond intentionnellement la partie et le tout ».

Peut être est-ce cela qui explique la tournure des dépêches de l’Agence Française de Presse. En attendant, il est cocasse de relever que l’opposition, vu l’ampleur de sa défaite, n’a, elle, contrairement à l’AFP, pas pris la peine de crier à la fraude.