Depuis la reprise en main opérée ces derniers mois par le président Ali Bongo Ondimba, le premier ministre est sous pression. Le chef de l’Etat, qui avait été contraint de déléguer en raison d’un AVC survenu en octobre 2018 dont les séquelles sont aujourd’hui largement estompées, veut des résultats. Et vite.
Demain, vendredi 27 décembre, Julien Nkoghe Bekale, fera devant les députés de l’Assemblée nationale sa déclaration de politique générale. Il brossera à cette occasion le bilan de son action en 2019 et dégagera les lignes directrices de celle à mener en 2020.
Si, à première vue, cet exercice, traditionnel, peut paraître une formalité, le Parti démocratique gabonais et ses alliés disposant d’une confortable majorité au sein de la première chambre avec plus de 120 députés sur 143, ça n’est pas sans pression que le premier ministre, nommé le 12 janvier dernier, prononcera demain vendredi son discours.
Julien Nkoghe Bekalé se sait étroitement surveillé par la Présidence qui, depuis le courant du mois d’octobre, a repris les choses en main. La composition des services de la Présidence, la haute-administration, la direction des entreprises publiques et le gouvernement a été revue en profondeur. La conséquence notamment d’une vaste opération anti-corruption lancée début novembre et qui a conduit une vingtaine de responsables publics en détention préventive à la prison centrale de Libreville.
Dans le même temps, le président Ali Bongo Ondimba, qui avait été contraint de déléguer suite à un AVC survenu en octobre 2018, a repris l’ensemble des commandes du pays. Très investi dans le champ régalien (sécurité intérieure, défense, diplomatie), faisant notamment un retour remarqué sur la scène internationale à l’occasion d’un sommet extraordinaire de la CEEAC le 18 décembre dernier, le numéro un gabonais s’est également à nouveau emparé personnellement des questions relevant de l’amélioration des conditions de vie au quotidien des populations (routes, éclairages publics, ramassage des ordures ménagères, etc.), un domaine qui relève traditionnellement de l’action du premier ministre.
Retour à la normale
Le résultat ne sait pas fait attendre. Le gouvernement traîne les pieds pour venir en aide aux populations sinistrés du Moyen-Ogooué et de la Ngounié suite à des inondations exceptionnelles ? Le président tape sur la table et quelques jours plus tard le premier ministre, accompagné d’une flopée de membres du gouvernement (Défense, Intérieur, Infrastructures…) se rend sur place pour annoncer des mesures immédiates. Le même scénario s’est reproduit ces dernières semaines s’agissant de la RN 1 à réhabiliter, de l’éclairage public à renforcer à Libreville, Owendo et Akanda, de même que les ordures ménagères à collecter dans les principales localités du pays. « Le premier ministre a eu les mains largement libres durant la majeure partie de 2019. Cette parenthèse est désormais close », commente un poids lourd du gouvernement qui confirme l’omniprésence de la Présidence.
Julien Nkoghe Bekalé, loin de se formaliser, accepte ce retour à la normale dans un pays où le président concentre la réalité des pouvoirs. Il se sait également, comme tous les ministres, sur la corde raide. « Etre membre du gouvernement n’est pas un métier, c’est une mission. Aujourd’hui, vous ne pouvez pas penser que parce que vous êtes au gouvernement, vous pouvez y rester cinq ans, dix ans ou plus. C’est l’efficacité et la compétence qui prime », avait-il déclaré, lucide, dans une interview à Jeune Afrique. Et pour cause, il sait mieux que quiconque au Gabon que le président Ali Bongo Ondimba attend des résultats. Et vite.