De plus en plus isolé, Jean Ping se résout à écrire aux membres du conseil de sécurité de l’ONU

Jean Ping, leader de la CNR. © Twitter – PRJeanPing

C’est la lettre du désespoir. Dans l’impasse politique au Gabon suite aux dissensions dans le camp de l’opposition et peu audible à l’international, Jean Ping, le leader de la Coalition pour le Nouvelle République, a écrit fin mai aux membres du Conseil de sécurité de l’ONU. Un coup médiatique plus que politique, sa requête n’ayant aucune chance d’aboutir. Explication. 

Le courrier (dont La Libreville a pu lire une copie) est daté du 23 mai 2018. Il est signé de la main de l’avocat parisien William Woll, mandaté par l’opposant gabonais Jean Ping.

Son objet est mentionné d’emblée : « J’ai l’honneur de vous contacter […] afin d’obtenir du Conseil de Sécurité des Nations Unies l’adoption de sanctions ciblées contre le régime d’Ali Bongo… ». La raison selon l’auteur de ce courrier : « le coup d’Etat commis par Ali Bongo lors de l’élection présidentielle d’août 2016 » qui constituerait « une menace à la paix et à la sécurité internationales justifiant une intervention du Conseil de sécurité ». S’en suit 9 pages d’argumentaires et 29 pages d’annexes, soit 38 pages au total.

Cette démarche surprend les spécialiste du droit international. « Demander une intervention du conseil de sécurité deux ans après une élection dans un pays où l’on ne déplore aucun trouble est pour le moins baroque », souligne un spécialiste du droit international, professeur à la faculté de droit d’Assas à Paris.

Un ex-compagnon de route de Jean Ping juge, quant à lui, la démarche maladroite et même surprenante pour cet ex-président de la commission de l’Union africaine et ancien président de l’Assemblée générale de l’ONU. « Cette démarche n’ayant aucune chance d’aboutir, Jean Ping prend de nouveau le risque de montrer qu’il est isolé et que ses méthodes sont vouées à l’échec », déplore cette personnalité qui dit avoir conservé toute sa sympathie pour le leader de la CNR.

Un professeur de droit de l’Université Omar Bongo de Libreville pointe lui du doigt l’attitude de Jean Ping « qui appelle au secours la communauté internationale alors qu’il est fuyant vis-à-vis de la Justice de son pays qui lui a pourtant demandé de venir s’expliquer sur certains dossiers ».

En réalité, ce courrier a une vocation moins juridique que médiatique. Il est en réalité destiné à permettre à Jean Ping de reprendre la main au moment où celui-ci est en perte de vitesse, les rangs de ses soutiens s’éclaircissant de plus en plus tant à l’extérieur qu’à l’intérieur du pays.

A l’international, aucune des démarches qu’il a entreprises n’ont abouti et plus le temps passe plus l’écoute dont il bénéficie s’affaiblie. Quant à la situation politique intérieure, l’unité qu’il était parvenu à faire sur son nom lors de la présidentielle de 2016 s’est fissurée depuis, une bonne partie de l’opposition ayant soit rejoint le gouvernement (qui compte sept opposants en son sein) ou bien s’apprête à participer aux prochaines élections législatives (qui devrait se tenir dans deux ou trois mois) contre l’avis de Jean Ping qui plaide pour leur boycott.