Le « Copil citoyen », qui fait actuellement parler de lui, fait penser à « Appel à agir ». A plus d’un titre. Explications.
Un même objectif : entraver l’action publique dans un but politique
Fin 2018, un collectif déboulait, tel un météorite, dans le paysage politique gabonais. Appel à agir, c’est son nom, avait en vain tenter de faire reconnaitre la vacance du pouvoir présidentiel. Fin 2021, c’est au tour d’un autre collectif de faire une entrée fracassante sur la scène publique : le Copil citoyen. Son objectif : contester, officiellement en tout cas, les mesures prises par les pouvoirs publics pour freiner l’épidémie de Covid-19.
Dans l’un et l’autre cas, le but semble différent. Mais en apparence seulement. Car dans les deux cas l’objectif est en réalité le même : entraver l’action publique. Pour Appel à agir, il s’agissait de contester la capacité du président de la République à exercer sa fonction et donc d’entraver son action. Pour le Copil citoyen, il s’agit de perturber la stratégie de lutte anti-Covid décidée par l’Exécutif en retardant la mise en œuvre de certaines mesures. Tel un parasite qui tente de se loger dans la bête pour se développer.
Dans les deux cas, des opposants s’abritant derrière la « société civile »
Par ailleurs, dans les deux cas, les actions de ces « collectifs » sont menées à des fins politiques. Car le Copil citoyen, comme Appel à agir en son temps, a beau tenter de revêtir les habits de la « société civile » pour tenter de ratisser large, il n’en reste pas moins un regroupement d’opposants politiques. Il suffit, pour s’en convaincre, de jeter un coup d’œil sur sa composition : Jean Valentin Leyama, Geoffroy Foumboula, René Ndong Sima, Jean Rémy Yama, Marcel Libama, Marc Ona Essangui (un cumulard car il était déjà membre d’Appel à agir ), etc. En termes de neutralité politique, on a vu mieux… Tous sont en effet des opposants notoires – souvent virulents – à la majorité présidentielle. De ce point de vue, le Copil citoyen n’a rien à envier à Appel à agir qui, en son temps, était considéré comme un repère d’opposants dont certains brillés par leur arrivisme (Anges Kevin Nzigou et Jean Gaspard Ntoutoume Ayi en particulier).
« Les partis d’opposition au Gabon sont trop faibles et discrédités. C’est pourquoi la plupart du temps, pour tenter de rebondir ou de faire un coup, les opposants avancent masqués, en utilisant le cheval de Troie de la société civile », explique un professeur en science politique de l’Université Omar Bongo de Libreville (UOB).
Des méthodes communes
Sur le plan des méthodes utilisées, ce n’est pas là le seul point commun entre les deux collectifs. Dans les deux cas, on constate la même propension à recourir à la Justice. Appel à agir, on s’en souvient – ses membres s’en étaient d’ailleurs enorgueillis – avait multiplié les recours (en premier instance, en appel et jusque devant la Cour de cassation) pour tenter de faire constater la vacance du pouvoir présidentiel. Trois ans plus tard, le Copil citoyen utilise les mêmes recettes. Après avoir saisi une première fois la Cour constitutionnelle pour faire annuler l’arrêté gouvernemental du 25 novembre 2021 relatif aux mesures anti-Covid, il a de nouveau saisi mardi 28 décembre la Haute Juridiction en espérant faire subir le même sort à l’arrêté du 24 décembre dont le contenu est strictement identique au précédent. Dans les deux cas, il est cocasse d’observer la façon dont ces opposants, qui d’habitude non pas de mots assez durs pour dénoncer une Justice supposée être aux ordres du pouvoir, l’encenser quand les décisions judiciaires leur sont favorables…
Un destin commun ?
Le Copil citoyen subira-t-il, in fine, le même sort que son grand frère, Appel à agir, dont il est à l’évidence un erstaz ? « Appel à agir n’aura, au final, était qu’un feu de paille. Trois ans après, il n’en reste plus rien ou presque », constate notre professeur en science politique de l’UOB. « Ce collectif a échoué à atteindre son objectif. Ali Bongo Ondimba s’est maintenu au pouvoir et il est en position de force en vue de la présidentielle de 2023 pour laquelle il sera très probablement candidat et dont il sera le grand favori », fait observer l’universitaire.
Celui-ci prédit le même sort au Copil citoyen. « En réalité, ces regroupements sont largement des phénomènes médiatiques. Ils sont créés avec un nom marketing pour frapper l’opinion et dans l’objectif de faire un coup pour faire parler d’eux le plus possible. Mais cela ne dure jamais très longtemps. Les médias s’y intéressent un temps, avant de s’en détourner et passer à autre chose. C’en est alors fini », explique le professeur.
En ayant fait deux recours devant la Cour constitutionnelle, le Copil citoyen a probablement atteint son véritable objectif : faire parler de lui. A l’évidence, il vit son quart d’heure de gloire warholien, comme Appel à agir en son temps. Mais ses membres devraient en profiter car ils en ont probablement mangé leur pain blanc. Il n’en restera bientôt plus une miette.